La structure cérébrale des experts en karaté

La matière blanche des ceintures noires montre à quel point un puissant coup de poing provient du cerveau

Les scanners cérébraux ont révélé des caractéristiques distinctives de la structure cérébrale des experts en karaté, qui pourraient être liées à leur capacité à frapper avec puissance à bout portant.

Des chercheurs de l’UCL et de l’Imperial College London ont découvert que les différences de microstructure des connexions dans le cerveau étaient corrélées à la manière dont les ceintures noires et les novices se comportaient lors d’un test de capacité de frappe.

Les experts en karaté sont capables de générer des forces extrêmement puissantes avec leurs coups de poing, mais la façon dont ils le font n’est pas totalement comprise. Des études antérieures ont montré que la force générée dans un coup de poing de karaté n’est pas déterminée par la force musculaire, ce qui suggère que des facteurs liés au contrôle des mouvements musculaires par le cerveau pourraient être importants.

L’étude, publiée dans la revue Cerebral Cortex , a examiné les différences de structure cérébrale entre 12 praticiens de karaté ayant un grade de ceinture noire et une moyenne de 13,8 années d’expérience du karaté, et 12 sujets de contrôle du même âge pratiquant une activité physique régulière mais n’ayant aucune expérience dans les arts martiaux.

Les chercheurs ont testé la puissance des sujets, mais pour établir des comparaisons utiles avec les novices, ils ont limité la tâche aux frappes à courte portée, soit une distance de 5 centimètres. Les sujets portaient des marqueurs infrarouges sur les bras et le torse pour capturer la vitesse de leurs mouvements.

Comme prévu, le groupe de karaté a donné un coup de poing plus fort. La puissance de leurs coups de poing semblait dépendre du timing: la force qu’ils généraient était corrélée à la qualité de la synchronisation du mouvement de leurs poignets et de leurs épaules.

Les analyses du cerveau ont montré que la structure microscopique dans certaines régions du cerveau était différente entre les deux groupes. Chaque région cérébrale est composée de matière grise, constituée des principaux corps de cellules nerveuses, et de matière blanche, constituée principalement de faisceaux de fibres qui transmettent des signaux d’une région à l’autre. Les scanners utilisés dans cette étude, appelés imagerie en tenseur de diffusion (ITD), ont détecté des différences structurelles dans la substance blanche des parties du cerveau nommées cervelet et cortex moteur primaire, dont on sait qu’elles sont impliquées dans le contrôle du mouvement.

L’imagerie en tenseur de diffusion est une technique d’IRM qui permet la cartographie in vivo de la microstructure et de l’organisation des tissus. Elle offre la possibilité de détecter et de quantifier des anomalies de la substance blanche non visibles en imagerie conventionnelle dans des pathologies cérébrales variées, est fréquemment intégrée aux protocoles IRM d’exploration de l’encéphale, et plus récemment de la moelle. 

Ces résultats montrent que le succès dans le sport pourrait ne pas être uniquement dû à des attributs physiques, mais également à des différences dans le cerveau des athlètes.

Professeur Masud Husain, Institut des neurosciences cognitives de l’UCL

Les différences mesurées par ITD dans le cervelet étaient en corrélation avec la synchronicité des mouvements du poignet et de l’épaule du sujet lors de la frappe. Le signal de la ITD était également en corrélation avec l’âge auquel les experts en karaté ont commencé à s’entraîner et leur expérience totale de la discipline. Ces résultats suggèrent que les différences structurelles dans le cerveau sont liées à la capacité de frappe des ceintures noires.

Nous commençons tout juste à comprendre comment les compétences dans différents domaines d’expertise sont associées à des variations dans la structure du cerveau. Ces résultats montrent que le succès dans le sport pourrait ne pas être uniquement dû à des attributs physiques, mais également à des différences dans le cerveau des athlètes.

Professeur Masud Husain


Une grande partie de la recherche sur la façon dont le cerveau contrôle les mouvements a été basée sur l’examen de la façon dont les maladies peuvent altérer les capacités motrices. Nous avons adopté une approche différente en examinant ce qui permet aux experts de mieux performer que les novices en matière de test d’aptitudes physiques.

Les ceintures noires du karaté ont pu coordonner leur action de frappe à plusieurs reprises avec un niveau de coordination que les novices ne peuvent pas produire. Nous pensons que cette capacité pourrait être liée à la mise au point de connexions neuronales dans le cervelet, leur permettant de synchroniser les mouvements de leurs bras et leur tronc très précisément.

Nous commençons tout juste à comprendre la relation entre la structure du cerveau et le comportement, mais nos résultats concordent avec ceux de recherches antérieures montrant que le cervelet joue un rôle essentiel dans notre capacité à produire des mouvements complexes et coordonnés.

Plusieurs facteurs peuvent affecter le signal ITD. Nous ne pouvons donc pas dire exactement à quelles caractéristiques de la substance blanche correspondent ces différences. Des études ultérieures utilisant des techniques plus avancées nous donneront une image plus claire

Dr Ed Roberts, du département de médecine de l’Imperial College London

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