Le livre de l’écoute

L’approche corporelle : Jean Klein

Notre corps est un bel instrument de musique, comme un Stradivarius, mais il doit être accordé. Nous sommes l’accordeur. Afin d’accorder cet instrument qui est si sensible, si secret, il faut une métamorphose totale de soi- même, et ceci ne peut se faire que lorsque nous faisons un avec notre instrument, avec notre corps.. Nous devons être très sensible afin d’accorder notre corps. Nous devons trouver le timbre, la qualité juste de l’accord, car le timbre n’est pas seulement vibration, c’est plus qu’une vibration.

Un timbre contient tous les autres timbres. Un accord contient tous les autres accords. Il faut que nous ayons une écoute bipolaire, une écoute interne, qui s’accorde à l’intérieur et à l’extérieur. Nous devons écouter ce qui se passe à l’intérieur du corps, et ce qui vient du soi-disant extérieur. A strictement parler, il n’y a ni extérieur ni intérieur.

Ce bel instrument doit être ressenti. C’est en le ressentant que nous parvenons à l’accord juste. Cela demande un art très élevé de l’écoute. Toute notre structure musculaire doit être maintenue en accord dans l’inaction ainsi que dans l’action . C’est une écoute bipolaire. Nous devons devenir capable d’écouter. Entendre ces fines vibrations vient d’abord dans la méditation. Il y a un moment très important lorsque vous écoutez à l’intérieur, lorsque vous écoutez l’écoute même. Lorsque vous êtes conscient dans l’écoute, il n’y a pas d’écouteur, et rien n’est écouté. Il n’ y a que l’écoute. ( longue pause)

C’est extraordinaire de se découvrir en train d’écouter. Mais d’abord il y a l’écoute d’un objet, ensuite vient l’écoute de soi- même. Lorsque l’écoute est Silence, notre instrument de musique, notre corps, est totalement pénétré par cette écoute sans objet. Alors naît quelque chose qui est au delà l’être humain.

Vous n’êtes ni le corps, les sens ni le mental. Vivez vraiment dans l’absence de ce que vous n’êtes pas, et cette réalité sera l’arrière plan de la vie. Vivez dans l’absence de vous- même. Dans l’absence de vous- même il y a présence. Nous devrions saisir toute occasion de nous écouter nous- même sans diriger, sans changer, sans chercher quelque chose de nouveau. Lorsque nous nous écoutons nous- même et soutenons l’écoute, il y a une transformation, il y a une sorte de métamorphose.

Cette écoute sans direction n’est fixée ni dans le front, ni dans le cœur,ni dans la région abdominale. L’écoute est absolument sans objet. En réalité c’est un oiseau qui vole partout. Observez quand il atterrit.au moment où vous vous rendez compte que vous le fixez, dans cette prise de conscience, un vide apparaîtra et cela devient l’ouverture.
Ne mettez pas l’oiseau en cage. Ouvrez toutes les portes.

Soyez conscient le matin, qu’avant le réveil du corps il existe une autre forme de réveil. Vous sentez alors le corps apparaître en vous dans cette présence éveillée. Voyez comment le corps se réveille en vous a ce moment. Vous sentirez que l’ancien corps conditionné tente de revenir, les vieilles pensées , sensations, habitudes et ainsi de suite.

Allez vers la sensation tactile. Il se peut qu’elle apparaisse d’abord dans les mains. Évoquez cette sensation tactile et vous sentirez un lâcher prise. Ressentez le. C’est suffisant. Prenez conscience des épaules, et aussi de la région frontale. Vous devriez vous laisser aller totalement dans votre lit. Mettez tout le poids de votre corps, tête, épaules, omoplates, mains, et les jambes, sur le lit, sur le sol, jusqu’à ce que toutes les parties du corps soient lourdes. Ayez l’impression que l’énergie vient de la terre et qu’elle parvient au corps humain, et que le corps humain est inter- pénétré par cette énergie. C’est quelque chose de très beau. Vous deviendrez conscient que vos tensions sont des défenses qui sont des réactions. Laissez cela devenir si tangible le matin que vous conservez cette connaissance en arrière plan tout au long de la journée. C’est une sorte de contact interne.

Vous vous sentez bien plus vivant. Il est seulement possible d’aller au delà de la contraction du corps en ressentant le corps, en étant conscient. Lorsque vient cette expansion du corps, vous devenez libre de la région frontale, et vous vous sentez localisé derrière, dans votre cerveau ancien. Ne faites pas d’effort pour y parvenir, cela vous appartient, cela vous libère du corps, cela vous libère de l’espace, de toute direction. Je dirais, vous êtes au delà de l’espace.

Vous devez vous libérer du méditant. Ceci est une parole très profonde. Faites en la vôtre. Il n’y a pas de méditant, il n’y a que la méditation. Le mental peut être tranquille sans essayer d’être tranquille. C’est seulement dans votre absence qu’il y a tranquillité, présence.

Dans l’absence que vous n’êtes pas, il y a présence. Mais ce n’est pas une présence objective, cette présence. C’est une double absence. Et lorsque vous l’avez, ne vous en éloignez pas. Au moindre mouvement vous vous en éloignez.

Abandonnez tout résidu dans le front. Alors seulement le savoir devient être-connaissance . Le savoir prend place dans le front, devant vous. Être connaissance n’est localisé nulle part. Mais temporairement elle se situe comme derrière vous. Cette sensation d’aller vers l’arrière est très importante parce qu’elle vous éloigne de l’usine à pensées qui se situe dans le front. Lorsque vous êtes localisé derrière vous à la base du crâne, vous ne pouvez pas penser. L’impulsion même de penser s’éteint. Aucune formulation ne peut survenir lorsque vous êtes localisé derrière. Mais en fin de compte même cette localisation subtile se dissout et vous vous trouvez nulle part, vivant nulle part.
Gardez vivant le parfum de notre rencontre.

Jean Klein in The Book of Listening dans une traduction d’Isabella Lewis

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