Le mandat du Ciel

Les Han conservaient le mandat du Ciel en observant les rites du culte impérial, un culte qu’ils vouaient à leurs ancêtres de la famille Liu, et plus particulièrement au Ciel lui-même. La cosmologie qui y était attachée, et qui avait pour mérite de lier entre eux l’ensemble des phénomènes de l’expérience humaine, permit au confucianisme de jouer un rôle politique de plus en plus central en tant que doctrine officielle de l’État.

L’antique cosmologie chinoise, la façon dont elle envisagea l’univers comme une totalité organisée, présente des différences frappantes avec la pensée occidentale. Par exemple, il n’y avait chez les anciens Chinois aucun mythe de la Création, aucun législateur suprême extérieur à notre monde, aucune cause première, pas même un big bang. Comme l’a dit Joseph Needham! ils enseignaient « une philosophie de type organiciste, dans laquelle l’ordre et l’harmonie universelle des volontés sont dépourvus de tout ordonnateur ». Cette conception s’écarte de la tendance invétérée qu’on observe partout ailleurs dans le monde, où l’existence d’une divinité surnaturelle est toujours supposée. Les Occidentaux qui se sont intéressés à la Chine n’ont cessé de projeter leurs propres conceptions sur la scène chinoise, oubliant que les Chinois, bien qu’ils tiennent le Ciel pour la puissance cosmique suprême, l’envisagent au sein même de la nature, immanente et non transcendante. Ce n’est pas le lieu ici de plonger dans ces eaux profondes, mais nous pouvons tout de même faire observer que la pensée des Han, telle que nous la trouvons reproduite dans les textes classiques, est bâtie à la fois sur un concept de l’homme qui envisage celui-ci comme une partie de la nature, et sur le concept d’une relation spéciale liant le souverain à ses ancêtres. Or, ces deux concepts étaient déjà prépondérants à l’époque des Shang, c’est-à-dire plus de mille ans auparavant.

John Fairbank in Histoire de la Chine : Des origines à nos jours

Nous avons perdu la Chine

C’est sur ces mots que, en décembre 1971, trente ans après Pearl Harbor, John K. Fairbank (1907-1991) exhortait ses étudiants de Harvard à « travailler et chercher à comprendre ». Son dernier livre, publié en 1991, résume toute une vie consacrée à la Chine. Historien de la fin des Qing et du xxe siècle, John K. Fairbank a été aussi un grand entrepre­neur des études sur la Chine moderne, le directeur de la Cambridge History of China, un pédagogue légendaire, et aussi un conseiller du gouvernement de Washington depuis les années 40. Rien d’étonnant donc à ce que l’auteur consacre autant de pages à l’époque moderne qu’aux trois millénaires précé­dents ! 

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