Hiver

鼕 dōng

Neige tamisée au travers des nuages ​​gelés, encre sur papier, Urakami Gyokudō
Neige tamisée au travers des nuages ​​gelés,
encre sur papier, Urakami Gyokudō

冬三月此謂
閉藏
冰地诉
無擾乎
早卧晚起
必待日光
使志
若伏若匿
若有私意
若已有得
去寒就温
無泄皮膚
使亟奪
此冬氣之應
養藏之
逆之則傷腎
春为痿厥
奉生者少

素問 sùwèn
冬三月此謂 dōng sān yuè cǐ wèi
Les trois mois de l’hiver sont appelés
閉藏 bì cáng
Fermer et thésauriser
水冰地坼 shuǐ bīng dì chè
L’eau gèle, la terre se fendille

L’hiver marque la fin du cycle annuel. La terre est épuisée, comme une mère ayant donné naissance à ses enfants, les ayant nourris, éduqués, portés vers la vie, il lui faut maintenant du repos. L’hiver scelle la séparation de ce qui fait la vie en se compénétrant. L’hiver prépare aussi la réunion des couples pour un nouveau départ, en attirant dans la profondeur les ferments de vie, en ensevelissant et thésaurisant (閉藏 bì cáng) pour forger l’assise de la puissance. La vie se préserve car elle s’en tient à ses racines, se fixe sur l’essentiel, ne s’occupe que de retrouver et préserver son unité originelle ; à ce prix, chaque membre d’un couple sera prêt à accueillir l’autre.

Le ciel et la terre ne communiquent plus.

La terre est livrée à elle-même et ses énergies travaillent en profondeur. Toute la nature s’endort à la surface du sol ; les manifestations de vie, à l’extérieur, sont réduites au minimum.

La mort est associée à l’hiver, mais suivant le principe même de la vie, qui procède en cycles perpétuels de morts et renaissances. En effet, toute forme de vie subit un développement immuable, en respectant différentes phases : naissance, croissance, maturité, vieillesse, mort et, par voie de transformation, nouvelle naissance.

無擾乎陽 wú rǎo hū yáng
Nulle excitation ne vient plus du yang
早卧晚起 zǎo wò wǎn qǐ
On se couche tôt, on se lève tard
必待日光 bì dài rì guāng
On s’en remet pour tout à la lumière du soleil

L’hiver exprime la manifestation du yin maximum, caractérisé par les phénomènes d’intériorité et d’involution. La vie ne concerne plus l’extérieur mais l’intérieur. Les arbres exsangues se montrent nus et squelettiques. La terre pelée ou couverte de neige se refroidit, poussant le règne animal à se réfugier dans des lieux d’hibernation. Les animaux vont ainsi reprendre des forces en limitant leurs activités et leurs besoins.

使志 shǐ zhì
On exerce le vouloir
若伏若匿 ruò fú ruò nì
Comme enfoui, comme caché
若有私意 ruò yǒu sī yì
Comme tourné seulement vers soi
若已有得 ruò yǐ yǒu dé
Comme occupé à se posséder

L’homme ne doit pas s’isoler de son environnement, car ses fonctions internes sont régies tout autant par les phénomènes extérieurs que par l’activité interne de ses organes. Or, aucun phénomène ne peut croître sans respecter des phases de repli ; la force d’expansion ne se conçoit que supportée par un phénomène de concentration préalable. La vitalité diurne n’est effective qu’après un repos nocturne, etc.

去寒就温 qù hán jiù wēn
On fuit le froid, on recherche la chaleur
無泄皮膚 wú xiè pí fū
Ne laissant rien s’échapper par les couches de la peau
使氣亟奪 shǐ qì jí duó
De peur d’être dangereusement démuni de ses souffles
此冬氣之應 cǐ dōng qì zhī yīng
Ainsi se conforme-t-on aux souffles de l’hiver

Ainsi, le cycle saisonnier contraint tout être vivant aux mêmes exigences d’alternance de rythme qui, si elles ne sont pas suivies, entraînent forcément un déséquilibre. L’homme n’agit plus, il résiste et lutte. Des symptômes comme la fatigue, la nervosité, les douleurs du dos, les sciatiques et les lumbagos, font leur apparition. Les influences climatiques sont perçues plus violemment, surtout le froid et l’humidité, qui vont accroître la fragilité de l’organisme.

養藏之道也 yǎng cáng zhī dào yě
La voie pour l’entretien de la thésaurisation de la vie
逆之則傷腎 nì zhī zé shāng shèn
Aller à contre-courant porterait atteinte aux reins
春为痿厥 chūn wèi wěi jué
Causant, au printemps, des impotences et fléchissements
奉生者少 fèng shēng zhě shǎo
Par insuffisance de l’apport à la poussée de la vie

La dysharmonie qui découle d’un hiver mal vécu se prolonge et peut s’accentuer au printemps. Un cercle vicieux s’installe au fil des saisons, régi par des pathologies de plus en plus lourdes. Considérer les rythmes de la Nature et s’y confor-mer permet de transformer le poids de la vie en Art de vivre. D’intégrer le terme écologie. De contribuer à l’équilibre des phénomènes planétaires, la révolution commençant par un ménage personnel.

Paysage d'hiver, Kayama Matazō
Paysage d’hiver, Kayama Matazō

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