La mĂ©moireLa mĂ©moire permet d'enregistrer des informations venant d'e... More permet d’enregistrer des informations venant d’expĂ©riences et d’Ă©vĂ©nements divers, de les conserver et de les restituer. DiffĂ©rents rĂ©seaux neuronaux sont impliquĂ©s dans de multiples formes de mĂ©morisation. La meilleure connaissance de ces processus amĂ©liore la comprĂ©hension de certains troubles mnĂ©siques et ouvre la voie Ă des interventions auprĂšs des patients et de leur famille.
Organisation cérébrale
Il nâexiste pas “un” centre de la mĂ©moire dans le cerveauè Š nÇo, mer de la moelle, garde les essences pures qui se .... Les diffĂ©rents systĂšmes de mĂ©moire mettent en jeu des rĂ©seaux neuronaux distincts, rĂ©partis dans diffĂ©rentes zones du cerveau. Lâimagerie fonctionnelle (tomographie par Ă©mission de positons, imagerie par rĂ©sonance magnĂ©tique fonctionnelle) permet aujourdâhui dâobserverLa mĂ©ditation commence par è§ guÄn . Tourner son regard v... le fonctionnement cĂ©rĂ©bral normal impliquĂ© dans les processus cognitifs.

Ainsi, le rĂŽle de lâhippocampe et du lobe frontal semble particuliĂšrement dĂ©terminant dans la mĂ©moire Ă©pisodique, avec un rĂŽle prĂ©pondĂ©rant des cortex prĂ©frontaux gauche et droit dans son encodage et sa rĂ©cupĂ©ration, respectivement. La mĂ©moire perceptive recrute des rĂ©seaux dans diffĂ©rentes rĂ©gions corticales, Ă proximitĂ© des aires sensorielles. La mĂ©moire sĂ©mantique fait intervenir des rĂ©gions trĂšs Ă©tendues, et particuliĂšrement les lobes temporaux et pariĂ©taux. Enfin, la mĂ©moire procĂ©durale recrute des rĂ©seaux neuronaux sous-corticaux et au niveau du cervelet.
Saisir et encoder
La premiĂšre Ă©tape est donc celle de la saisie, câest-Ă -dire de lâencodage des informations sensorielles. Cet encodage a quelques impĂ©ratifs. Il est en effet perturbĂ© si lâon souffre de dĂ©ficits sensoriels tels que la presbyacousie â perte progressive de lâaudition liĂ©e Ă lâĂąge â ou pire encore de surditĂ©. Il lâest Ă©galement en cas de troubles visuels non compensĂ©s comme la presbytie â trouble de la vision souvent associĂ© au vieillissement â ou encore de dĂ©gĂ©nĂ©rescence maculaire liĂ©e Ă lâĂąge. Et il va sans dire que lâencodage nĂ©cessite de bonnes capacitĂ©s dâattention.
La deuxiĂšme Ă©tape, qui concerne le stockage ou la consolidation de la trace mnĂ©sique, est un processus biologique. Quant Ă la troisiĂšme Ă©tape, on lui donne les noms de rappel libre (je me souviens spontanĂ©ment de ce que jâai appris), ou indicĂ© (jâai besoin dâindices pour me rappeler) de la mĂ©moire. Ces rappels peuvent se dĂ©rouler de maniĂšre consciente, avec un effort de remĂ©moration (fouiller dans ses souvenirs), ou inconsciente, lorsquâils surgissent spontanĂ©ment â comme lâa magnifiquement dĂ©crit Marcel Proust au dĂ©but du XXe siĂšcle, avec la petite madeleine du narrateur dâA la recherche du temps perdu. Prenons le temps de nous arrĂȘter sur ces écrits devenus une vĂ©ritable mine dâinspirationâŠ
« Il y avait dĂ©jĂ bien des annĂ©es que, de Combray [âŠ] Elle envoya chercher un de ces gĂąteaux courts et dodus appelĂ©s petites madeleines qui semblent avoir Ă©tĂ©
〠xiĂ se caractĂ©rise par un mouvement dâexpansion vers... More moulĂ©s dans la valve rainurĂ©e dâune coquille de Saint-Jacques [âŠ] Mais Ă lâinstant mĂȘme oĂč la gorgĂ©e mĂȘlĂ©e des miettes du gĂąteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif Ă ce qui se passait dâextraordinaire en moi [âŠ] Un plaisir dĂ©licieux mâavait envahi, isolĂ©, sans la notion de sa cause [âŠ] DâoĂč avait pu me venir cette puissante joie ? Il est clair que la vĂ©ritĂ© que je cherche nâest pas en lui, mais en moi [âŠ] Je pose la tasse et me tourne vers mon esprit. Câest Ă lui de trouver la vĂ©ritĂ© [âŠ] La vue de la petite madeleine ne mâavait rien rappelĂ© avant que je nây eusse goĂ»tĂ© [âŠ] peut-ĂȘtre parce que, de ces souvenirs abandonnĂ©s si longtemps hors de la mĂ©moire, rien ne survivait, tout sâĂ©tait dĂ©sagrĂ©gĂ© [âŠ] »
Ancienne, sensorielle et mouvante
Ce qui a Ă©tĂ© vĂ©cu dâune maniĂšre émouvante et sensorielle, peut, Ă lâoccasion dâune mise en situation similaire, faire resurgir la prĂ©sence dâun souvenir encore bien vivant, alors quâon le pensait enfoui depuis longtemps. Et câest cette mĂ©moire ancienne et sensorielle qui fonctionne encore trĂšs bien chez les personnes souffrant de la maladie dâAlzheimer. Du reste, sans ĂȘtre malade, prĂȘtez-vous Ă lâexpĂ©rienceL'expĂ©rience rĂ©sulte d'une incorporation particuliĂšre et ... More. Réécoutez une berceuse ou une valse, apprĂ©ciez le goĂ»t si particulier de tel chocolat croquĂ© dans lâenfance, Ă©prouvez le toucher dâune Ă©corce ou dâune caresse, la vue dâun beau visage ou dâun coucher de soleil, lâodeur
è xiĂč s'emploie pour toutes les odeurs, les bonnes comme ... du parfum dâune grand-mĂšre bien aimĂ©e, des sous-bois oĂč vous alliez chercher du muguet ou des champignonsâŠ
Quand on Ă©voque des souvenirs, force est de constater quâils ne sont pas toujours fidĂšles Ă la rĂ©alitĂ© du moment, mais toujours en mouvance. Que se passe-t-il dans la construction de ces petits morceaux de vie dĂ©licieuse, celle du passĂ© ? Y a-t-il une mĂ©moire monolithique, ou des mĂ©moires de durĂ©es, dâintensitĂ©s, de profondeurs diffĂ©rentes ? Que pouvons-nous en tirer dâintĂ©ressant pour ceux et celles qui souffrent de la maladie dâAlzheimer ? Câest ce que nous allons explorer.
Des mémoires
Il nây a pas une mais des mĂ©moires.
- La mĂ©moire sensorielle, trĂšs labile, ne dure que quelques millisecondes et constitue lâempreinte ou la trace mnĂ©sique. On la qualifie aussi de « subliminale », car elle sâinscrit dans le cerveau de maniĂšre quasi inconsciente. Câest cette mĂ©moire que certains publicitaires sollicitent, pour nous pousser Ă lâachat de leurs produits⊠Lâodeur du cafĂ©, la musique associĂ©e Ă sa publicitĂ©, la couleurèČ sĂš s'emploie non seulement pour les diffĂ©rentes couleu... de son emballage, tout va faire signe et nous conduire presque de façon subliminale vers ledit cafĂ©.
- La mĂ©moire Ă court terme, ou mĂ©moire de travail, est un peu plus longue : quelques minutes. NĂ©cessaire Ă notre quotidien, elle nous permet de retenir une information utile qui sera ensuite effacĂ©e comme un numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone, une place de parking, une liste de courses, etc. Or cette mĂ©moire est trĂšs sensible Ă notre capacitĂ© dâattention et de concentration, au stress et Ă la dĂ©pression. Câest donc la plus altĂ©rĂ©e en cas de maladie dâAlzheimer.
- La mĂ©moire Ă long terme, elle, rĂ©sulte dâun stockage durable dans certaines zones du cerveau. On peut la subdiviser en mĂ©moire dĂ©clarative, et non dĂ©clarative.
Mémoire déclarative
Que lâon nomme Ă©galement mĂ©moire explicite, est consciente et verbalisable, et lâon y distingue trois sous-types.
- Dâabord, une mĂ©moire dite épisodique : câest le oĂč, quand, et comment, jâai fait telle chose, mĂ©moire fondamentale Ă la fois en termes dâadaptation Ă lâenvironnement et de sentiment dâidentitĂ©.
- Ensuite, il y a la mĂ©moire que lâon dit sĂ©mantique. Elle est trĂšs liĂ©e au niveau de scolarisation et dâĂ©ducation, câest-Ă -dire Ă notre rĂ©serve cognitive : elle nâest pas la mĂȘme selon que nous avons fait peu dâĂ©tudes ou au contraire frĂ©quentĂ© les bancs de lâuniversitĂ© ou dâune grande Ă©cole, si nous avons ou pas un mĂ©tier stimulant, crĂ©atif, ou nĂ©cessitant dâentretenir constamment nos compĂ©tences, etc. En clair, cette mĂ©moire sĂ©mantique est tributaire du niveau socioculturel, câest-Ă -dire non pas dâun statut social mais dâapprentissages cumulĂ©s tout au long de la vie : il nây a pas dâĂąge limite pour apprendre !
- Enfin, on compte aussi dans cette catĂ©gorie une mĂ©moire dite autobiographique, faite de nos souvenirs personnels. In fine, la mĂ©moire dĂ©clarative repose sur lâenregistrement de connaissances culturelles ou gĂ©nĂ©rales quâun individu peut faire Ă©merger consciemment avec la mĂ©moire sĂ©mantique. Ainsi, le seul fait quâun homme ait marchĂ© sur la lune peut avoir Ă©tĂ© en rapport avec notre propre vie (par exemple, câĂ©tait un moment oĂč lâon Ă©tait installĂ© devant le poste de tĂ©lĂ©vision des voisins, avec telle ou telle personneâŠ), tout en Ă©tant stockĂ© comme un Ă©lĂ©ment du savoir universel.
Mémoire procédurale
La mĂ©moire non dĂ©clarative, aussi qualifiĂ©e de procĂ©durale ou implicite, nâest quant Ă elle pas accessible Ă la conscience. Il sâagit de souvenirs se rapportant Ă des associations et des savoir-faire comme lacer ses chaussures, nager, circuler Ă vĂ©lo, etc. Ces gestes ont Ă©tĂ© appris par leur rĂ©pĂ©tition, puis stockĂ©s dans une mĂ©moire procĂ©durale Ă long terme qui ne nĂ©cessite pas de rappel conscient. Et câest prĂ©cisĂ©ment sur cette mĂ©moire, implicite, non dĂ©clarative que nous pouvons nous appuyer trĂšs longtemps chez les patients atteints de la maladie dâAlzheimer. Car elle reste trĂšs vivace, de mĂȘme que les souvenirs les plus anciens de lâenfance.
Le mĂ©moire ne « sâuse » que si lâon sâen sert pas, il faut donc la faire travailler, tout en se faisant plaisir, et les occasions sont nombreuses ! Sa stimulation est aussi une voie qui porte ses fruits pour retarder la maladie dâAlzheimer et gagner des annĂ©es dâune meilleure vie.