Période des Printemps et Automnes

春秋战国 chūn qiū zhàn guó

La période des Printemps et Automnes désigne la première partie de la dynastie des Zhou orientaux, c’est-à-dire une période allant d’environ 771 à 481 AEC. Elle tire son nom des Annales des Printemps et Automnes.

Dague en bronze avec fourreau, VIe – Ve siècle AEC

Durant la période des Zhou occidentaux, les nombreux petits États qui s’étendent dans la vallée du fleuve Jaune et ses alentours jusqu’au cours du fleuve Bleu connaissent sous l’égide des rois Zhou un régime qui a pu être qualifié de féodal, reposant sur les liens de parenté et d’allégeance entre lignages aristocratiques, dont les pratiques rituelles sont dominées par le culte des ancêtres. Mais après la prise de leur capitale en 771 AEC et son déplacement plus à l’est, les nouveaux rois Zhou orientaux n’exercent plus qu’une autorité symbolique, et s’affirment alors des princes puissants qui exercent temporairement la fonction d’hégémon, leur assurant la direction de coalitions militaires regroupant plusieurs principautés. Mais aucune des grandes puissances n’arrive jamais à exercer une hégémonie durable et à regrouper tous les pays Zhou sous sa coupe, entraînant progressivement la Chine dans une phase de conflits de plus en plus aigus.

Hallebarde ge, Ve siècle
Hallebarde ge, Ve siècle

Cette évolution politique s’accompagne d’évolutions sociales et culturelles, surtout évidentes à partir de la seconde moitié du VIIe siècle AEC :

  • Les principautés dégagées de l’autorité et l’influence dominante de l’ancien centre politique et culturel affirment leur autonomie.
  • L’émergence de cultures régionales se révèle notamment dans l’art et les pratiques funéraires.
  • Un nouvel ordre politique se met lentement en place, substituant à l’ancien ordre fondé sur des rapports personnels et les lignages, une nouvelle organisation politique et sociale plus abstraite et systématique, qui est consacrée par la suite sous les Royaumes combattants.
  • Les modes de pensée évoluent aussi à la fin de la période, avec notamment la figure de Confucius qui, tout en se voulant un restaurateur de l’ancienne tradition Zhou, pose les bases d’une nouvelle façon de penser l’homme et l’action politique.

Le culte des ancêtres est un élément majeur de la religion de la période des Printemps et Automnes, marqué par les traditions mises en place à la cour royale des Zhou, notamment à la suite d’une « réforme » rituelle au IXe siècle. Il a lieu dans des temples, où se déroulent à diverses occasions des sacrifices mais aussi d’autres cérémonies à caractère politique. C’est là qu’est préservé le mobilier cultuel, qui a été mis au jour dans les tombes où il accompagne les grands personnages. Il s’agit avant tout de vases destinés à différents actes sacrificiels, les formes indiquant une fonction. On distingue les vases destinés :

  • à la cuisson de la viande des animaux sacrifiés : tripodes ding et li,
  • à la cuisson des céréales : coupes dui et du, vase gui,
  • à la présentation des mets : vases fermés fu,
  • aux boissons fermentées à base de céréales : bassins jian qui servent à les chauffer, jarres fanghu,
  • aux ablutions d’eau : saucière yi, bassins pan.

Parmi les instruments utilisés, les cloches sont bien connues par plusieurs trouvailles archéologiques.

La pratique divinatoire recouvre un ensemble de pratiques qui permet la mise en communication du monde des humains avec celui des esprits sur tout un ensemble de sujets : opportunité d’un rituel, d’une décision politique, d’une bataille, d’un voyage, révélation d’une malédiction (qu’il faut ensuite combattre par un exorcisme), etc.

Les recours à la divination plus communs voient les hommes être à l’initiative : ils soumettent une question aux esprits, qui répondent par le biais de médiums qui peuvent être :

  • des carapaces de tortue qui sont passées sous le feu, ce qui provoque des craquelures dont la forme est ensuite interprétée pour lire la réponse.
  • des bâtonnets d’achillée millefeuille, qui sont jetés au sol de façon répétée pour former des hexagrammes qu’il faut ensuite expliquer.

Dans les autres cas, ce sont les esprits qui ont l’initiative du message. Ils peuvent :

  • susciter des rêves révélant un présage,
  • intervenir par des mouvements astraux : éclipses surtout,
  • intervenir par divers événements sortant de l’ordinaire : désastres naturels, prodiges divers auxquels est accordée une origine surnaturelle.

L’interprétation des signes délivrés par le monde des esprits incombe à des spécialistes qui peuvent avoir une fonction importante dans les cours princières en raison de l’importance politique de la divination, dont des devins professionnels, des scribes ou des conseillers proches des dirigeants. Cette discipline est très technique, et nécessite des compétences reconnues. Le Commentaire de Zuo mentionne à plusieurs reprises des débats entre conseillers et devins, les premiers remettant souvent en question le bien-fondé de la divination pour diriger l’action politique, et cherchant à en relativiser l’usage pour privilégier l’observation des situations concrètes du présent et ce qu’on peut en déduire pour le futur.

La tradition intellectuelle héritée de la période des Zhou occidentaux est conservée dans des textes qui ont par la suite été considérés comme des classiques, et qui ont dès la période des Printemps et Automnes un prestige important. Ces ouvrages sont

  • le Livre des documents qui reprend des documents historiques anciens des archives royales,
  • le Livre des Odes qui compile des poèmes,
  • le Classique des changements.

Ils ont été compilés progressivement et canonisés sous la dynastie des Han, mais la date exacte de la rédaction de leurs différents passages reste souvent incertaine : une partie semble dater de la fin de la période des Zhou de l’Ouest, d’autres peuvent être antérieurs, beaucoup sont manifestement des écritures ou remaniements postérieurs, parfois attribuables à la période des Printemps et Automnes.

Les scribes des principautés des Printemps et Automnes produisent aussi des ouvrages de type historiographique :

  • Les Annales du pays de Lu, ou Annales des Printemps et Automnes qui ont donné le nom à la période et ont elles aussi été consacrées comme un classique par la suite.
  • Les Annales de Bambou sont un autre exemple de ce type d’œuvre à caractère historiographique qui doit s’appuyer sur des sources de la période.
  • Les autres cours princières et celle des Zhou ont probablement produit des œuvres similaires concernant leur passé, qui ont disparu.

Quant aux écrits que les époques postérieures ont attribué à des lettrés ayant vécu durant la période des Printemps et Automnes, comme Sun Tzu, Guan Zhong et évidemment Confucius (qui aurait remanié les classiques), il semble difficile d’affirmer qu’ils ont bien eu pour origine ces personnages, mais ils leur ont été rattachés en raison de leur prestige. Leur étude révèle souvent une forte empreinte de la période des Royaumes combattants. Seuls les Entretiens de Confucius sont couramment liés à la pensée de la personnalité à laquelle ils sont rattachés.