Esprits

焞 shĂ©n sont les puissances cĂ©lestes qui permettent Ă  chaque phĂ©nomĂšne vivant de dĂ©buter et dĂ©rouler la chaĂźne des changements et transformations qui composent son existence. Les esprits investissent une vie humaine dĂšs les dĂ©buts de sa formation, au stade fƓtal, car la subtilitĂ© des essences propres Ă  la nature humaine attire et accueille les esprits vitaux.

焞 shĂ©n

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Chapitre 66 du Suwen

Ce que le yin~yang ne peut sonder (æžŹ cĂš), ce sont les esprits.

Dans les textes mĂ©dicaux, la notion d’esprits est employĂ©e Ă  plusieurs niveaux, dĂ©terminĂ©s par le contexte. Il s’agit de distinguer soigneusement ces variations dans l’interprĂ©tation, tout en gardant leur rattachement Ă  un sens fondamental commun.

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En tant qu’extĂ©rieurs Ă  l’ĂȘtre, les esprits sont les puissances cosmiques, cĂ©lestes, originelles, qui permettent Ă  chaque phĂ©nomĂšne vivant de dĂ©buter et dĂ©rouler la chaĂźne des changements et transformations qui composent son existence. Les esprits manifestent l’ordre naturel de la vie dans le cosmos, qui se voit par exemple dans l’alternance rĂ©guliĂšre des quatre saisons, du jour et de la nuit, dans la modĂ©ration du vent et de la pluie 
 Ces manifestations harmonieuses s’offrent Ă  notre intelligence comme un exemple et un modĂšle pour la conduite de notre propre vie.

Ces mĂȘmes puissances se rendent prĂ©sentes dans un corps hum par elle-mĂȘmes et par le fait de l’homme.

çČŸç„ž jÄ«ng shĂ©n

Les esprits investissent une vie humaine dĂšs les dĂ©buts de sa formation, au stade fƓtal, car la subtilitĂ© des essences propres Ă  la nature humaine attire et accueille les esprits vitaux.

焞明 shĂ©n mĂ­ng

Paysage d'esprit de Xie Youyu, encre et couleur sur soie, Zhao Mengfu, 1254-1322
Paysage d’esprit de Xie Youyu, encre et couleur sur soie, Zhao Mengfu

Ces esprits apportent la lumiĂšre, la possibilitĂ© d’intelligence et de comprĂ©hension qui donne sa spĂ©cificitĂ© au cƓur humain et lui confĂšre conscience et discernement;

Par sa conduite, un homme fait venir Ă  lui et en lui les esprits, ou les rejettent. Celui qui se garde dans le calme et l’Ă©quilibre, sans dĂ©sirs ni passions qui troublent le cƓur et obscurcissent l’entendement, est de plus en plus Ă©clairĂ© par les esprits, en contact avec la nature des choses et l’ordre du monde; il et sage et avisĂ©, se conduit d’autant mieux et s’emplit encore davantage d’esprits.

On peut concevoir ces esprits comme les puissances cĂ©lestes, extĂ©rieures Ă  l’homme, mais non Ă©trangĂšres Ă  lui du fait de sa nature mĂȘme, qui viennent l’habiter, qui rĂ©sident dans son cƓur libre de soucis et libre de tout dĂ©sir. On peut les concevoir comme un « Ă©tat d’esprit », comme la maniĂšre dont ma personne, le soi, se forme; comme la façon dont mon cƓur – qui est esprit, mental, affectivitĂ©, intelligence – agit et rĂ©agit avec une intelligence qui est spirituelle et pas simplement logique ou rationnelle.

On peut alors dire que les esprits qui sont en mon cƓur sont en moi, qu’ils sont mon cƓur et qu’ils sont moi; ou encore que je est mon cƓur . Si je deviens ce que je suis destinĂ© Ă  ĂȘtre, par nature, alors je deviens esprit ou semblable aux esprits, puisque, par nature, les esprits viennent dans un humain et donnent la lumiĂšre Ă  son cƓur pour qu’il puisse conduire sa vie selon l’ordre naturel.

Fissuration - État d'esprit, 2015-2016, papier Xuan, acrylique à l'eau sur toile, Qiu Deshu
Fissuration – État d’esprit, 2015-2016, papier Xuan, acrylique Ă  l’eau sur toile, Qiu Deshu

On peut alors parler de la qualitĂ© du cƓur, de la vie personnelle, en terme d’esprits, considĂ©rer s’ils sont Ă©clairĂ©s ou entĂ©nĂ©brĂ©s, prĂ©sents ou absents, capables ou non de soutenir et guider les mouvements et activitĂ©s rĂ©gulĂ©s des souffles.

濃 xīn

Les esprits, considĂ©rĂ©s comme l’un des cinq esprits, peuvent mĂȘme reprĂ©senter le fonctionnement du cƓur, comme l’un des cinq organes pleins, fonctionnement qui concerne beaucoup l’Ă©quilibre affectif et mental. On peut mĂȘme parler d’excĂšs ou d’insuffisance des esprits, pour parler d’un excĂšs ou d’une insuffisance dans les activitĂ©s des souffles du cƓur.

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Ce qui est dans le cƓur, ce qui est moi, se rend prĂ©sent partout dans l’ĂȘtre par la circulation du sang et est perceptible par la prise des pouls. Les esprits d’une vie particuliĂšre s’appuient sur les essences qui donnent forme Ă  cette vie, tel le sang. C’est pourquoi ils sont aussi tributaires des essences et des souffles renouvelĂ©s par l’alimentation.

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Chapitre 13 du Suwen

PossĂ©der (ćŸ— dĂ©) les esprits, c’est le resplendissement (昌 chāng) de la vie. Perdre (怱 shÄ«) les esprits, c’est l’anĂ©antissement (äșĄ wĂĄng).

L’harmonie de sang et souffles reflĂšte l’harmonieux fonctionnement de tous les organes. Quand ils opĂšrent normalement, le cƓur est nourri d’Ă©quilibre et d’harmonie, ce qui lui permet de mieux recevoir les esprits et leur lumiĂšre qui Ă©claire le mental et la conduite. Le cƓur pulse dans tout l’organisme un sang bienfaisant, plein de la prĂ©sence des esprits; ce qui fait que toutes les parties de l’ĂȘtre se conduisent selon l’ordre naturel; la reconstruction opĂšre parfaitement et la dĂ©fense est Ă  son comble. Ainsi peut-on dire que les esprits sont les souffles corrects de l’homme, puisque c’est leur prĂ©sence en moi – ou la façon dont je me rends semblable Ă  eux – qui fait que les souffles sont comme ils doivent ĂȘtre, authentiquement. Les maladies ne peuvent alors pas s’installer, ni celles venant de l’extĂ©rieur, ni celles dues Ă  des dĂ©sordres Ă©motionnels internes.

Pratique quotidienne, Sutra du cƓur, 2019, encre et couleur sur papier, Wang Huangsheng
Pratique quotidienne, Sutra du cƓur, 2019, encre et couleur sur papier, Wang Huangsheng

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Chapitre 71 du Lingshu

Si le cƓur est atteint, les esprits s’en vont, et quand les esprits s’en sont allĂ©s, c’est tout simplement la mort.

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èĄ€æ°Łè€…ïŒŒäșșäč‹ç„žïŒŒäžćŻäžèŹč逊。

Chapitre 26 du Suwen

VoilĂ  pourquoi pour entretenir la vie des esprits (逊焞 yǎng shĂ©n), il est nĂ©cessaire de connaĂźtre l’Ă©tat de rĂ©plĂ©tion ou d’Ă©maciation du corps, la montĂ©e en puissance ou le dĂ©clin du sang et des souffles de la nutrition et de la dĂ©fense. Le sang et souffles (èĄ€æ°Ł xuĂš qĂŹ), c’est les esprits de l’homme; on ne peut pas ne pas faire trĂšs attention Ă  leur entretien.

Le dĂ©part des esprits signifie la mort (æ­» sǐ) et peut s’entendre Ă  plusieurs niveaux. Si l’on considĂšre les esprits comme :

  • les souffles du cƓur et son fonctionnement, l’arrĂȘt cardiaque est la mort.
  • ce qui, depuis l’origine, permet le dĂ©roulement de ma vie, leur dĂ©part est rupture ou Ă©puisement de la dotation originelle, la mort.
  • moi qui me modĂšle sur le ciel, la mort est le dĂ©part vers le ciel de cette partie de moi, que l’on peut appeler esprits, esprits vitaux, ou mĂȘme Ăąmes 魂 hĂșn, qui deviennent aprĂšs la mort les mĂąnes glorieux.
  • ce qui donne accĂšs Ă  la rĂ©alitĂ© des choses, procure l’intelligence de la vie, leur absence est l’obscurcisse-ment du mental, la dĂ©raison, la folie. L’homme peut alors survivre en son corps, mais sans rĂ©aliser ce qui fait de lui vraiment un homme : un cƓur qui bat au rythme de l’univers et le fait compagnon de la voie du ciel.
Avec le soutien du yin et l'étreinte de l'harmonie yang, 2016, encre sur papier fait main, Hsu Yung Chin
Avec le soutien du yin et l’Ă©treinte de l’harmonie yang, 2016, encre sur papier fait main, Hsu Yung Chin
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