Manuscrits de Mawangdui

馬王堆 Mǎwángduī

Lors de fouilles effectuées en 1972 et 1973 sur le site de Mawangdui dans la province du Hunan, les archéologues chinois découvrirent les plus anciens documents connus concernant la médecine chinoise ainsi que des exemplaires du Livre de la voie et de la vertu et du Classique des changements dans un groupe de tombes datant de la dynastie Han.

Parmi les trente-six ouvrages répertoriés dans les livres classés « techniques et recettes thérapeutiques », dont un manuel de palpation des pouls (脉法 mài fǎ), se trouvait le Classique interne de l’empereur Jauneparvenu sous une forme incomplète, très remaniée et datant de 168 AEC. On constata que les théories médicales étaient en pleine élaboration avec une quête obsessionnelle de la longévité et de la puissance sexuelle. Les méridiens, par exemple, sont décrits dans le Canon de moxibustion des onze méridiens yin et yang –version A (陰陽十一脈灸 yīnyáng shíyī mài jiǔ jīng) et sont au nombre de onze sur les douze que l’on connaît, le méridien maître du cœur étant manquant. Les textes apportent d’ailleurs la démonstration que ce méridien est, parmi les méridiens principaux le dernier à apparaître. Inconnu au IIIe AEC, il est intégré comme douzième méridien entre le Ie siècle AEC et le I-IIe siècle EC, état de fait qui se verra dans le Classique des difficultés où il est cité dans la difficulté 25 et 66. Les points d’acupuncture sont rarement mentionnés et leur dénomination est inconnue. En fait, il semblerait que ce soit 王冰 Wáng Bīng qui les ait introduits. On s’aperçoit qu’il n’y a pas de référence à une théorie des organes ou à un système des cinq éléments. La moxibustion est la seule technique thérapeutique de la médecine des méridiens.

Bien sûr, les aiguilles métalliques sont totalement ignorées. Les thérapeutes de cette époque utilisent essentiellement la pharmacopée et la régulation des souffles. Ces découvertes objectivent que pendant les deux siècles de la dynastie des Han occidentaux (206 AEC – 23 EC), la pensée médicale chinoise a subi un processus de normalisation complète et de systématisation. Les manuscrits médicaux de la tombe 3 montrent que les textes classiques de médecine, en particulier le 黄帝内經 Huángdì nèi jīng qui est considéré comme le plus ancien des écrits de leur genre, avait non seulement été compilé bien plus tard qu’il n’est communément admis dans la tradition chinoise, mais que même des points de vue qui y sont représentés n’auraient pu se développer avant les Han. Ainsi, sur la base de ces textes manuscrits, on a pu déterminer que, au moment des Qin (221 AEC – 206 AEC) et le début des Han de l’Ouest la plupart des caractéristiques typiques de l’art de guérir chinois n’avait pas été systématisé.

Ces manuscrits brisent l’image d’une médecine chinoise quasi-révélée, figée dans une sorte de grandiose immobilité, et la remplacent par la vision de thérapeutes qui tâtonnent, cherchent, expérimentent et progressent.

Robert Y. in Aspects de la médecine chinoise au IIe siècle avant notre ère

Ces manuscrits permettent aussi de souligner l’importance du Nanjing et son rôle dans l’établissement une nouvelle orientation du corpus standardisé et systématique des connaissances de la médecine chinoise. Enfin, il apparaît que la notion des méridiens était antérieure à celle des points d’acupuncture.

Il se confirme que plus on remonte loin dans le passé, plus le nombre de points d’acupuncture décroit.

Nguyen P. in La formation historique du système des méridiens : les textes de Mawangdui et leurs interpretations. 

Ainsi, le paradigme le plus couramment repris actuellement qui dit que le système des Jingluo doit être pensé comme la théorie d’intégration des points d’acupuncture et qui part du principe de leur antériorité, serait inexact. 

Figures de daoyin, tombe de Mawangdui
Figures de daoyin, tombe de Mawangdui

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