Corps

Le Classique interne de l’empereur Jaune aborde sous forme de dialogues la description du corps humain, son fonctionnement, ses relations avec le cosmos, l’art du diagnostic et de la thérapeutique.

Les taoïstes, eux, ont traité du corps dans ses finalités pratiques, ses usages, développant toutes sortes de techniques du corps et de l’esprit destinées à dégager l’individu des contraintes du corps physique et à laisser de ce fait une large place au corps symbolique.

Les deux types de sources sont complémentaires, car c’est dans la mise en oeuvre des processus liés au corps qu’on en saisit bien l’image.

體 tǐ

corps, forme, santé

Plusieurs termes chinois recouvrent la notion de corps, le caractère 體 tǐ, organisme, fait référence à la structure corporelle organisée et ordonnée diachroniquement. Cette notion va de pair avec 禮 lǐ, les rites, les deux concepts étant souvent donnés comme renvoyant l’un à l’autre. Dans le contexte médical et taoïste, les termes les plus employés pour désigner le corps sont 身 shēn et 形 xíng.

身 shēn

corps, corporel, tronc, coque, carrosserie, vie, durée de vie, soi-même, personnellement

Le terme shēn est ambigu, il comprend à la fois l’idée de corps et celle de personne, les deux sens se distinguant uniquement d’après le contexte et l’ensemble sémantique dont ils font partie. Shēn implique l’idée de dynamisme, d’élément en mouvement.

Ce qui peut se plier et s’allonger.

Explication des noms

形 xíng

paraître, comparer, forme, corps, silhouette

Le terme xíng, quant à lui, fait référence au corps matériel, à la forme visible ; il est souvent opposé au souffle, 氣 qì, invisible, émanation de toute chose en constante évolution. Xíng renvoie donc à la forme corporelle, dont les principaux composants sont : le souffle, 氣 qì, le sang, 血 xuè, l’essence, 精 jīng, les sécrétions organiques, 津液 jīnyè, mais aussi des éléments de la vie psychique tels que les sentiments naturels, 性 xìng, les émotions, 情 qíng, les cinq forces psychiques de l’individu, ainsi que les esprits, 神 shén, mis en relation avec des secteurs précis du corps. Xíng est parfois opposé à l’aspect invisible et subjectif de la personne exprimé par shén.

Maintenir l’union du corps et des esprits

上古之人
Les hommes de la haute antiquité
其知道者
Étaient des observants de la voie
法於陰陽
Ils se réglaient sur le yin~yang
和於術數
Et atteignaient l’harmonie par les pratiques et les nombres
食飲有節
Ils buvaient et mangeaient avec mesure
起居有常
Ils travaillaient et se reposaient avec régularité
不妄作勞
Ils ne s’exténuaient pas en activités inconsidérées
故能形與神俱
Pouvant ainsi maintenir l’union du corps et des esprits
而盡終其天年
Ils allaient au bout de l’âge naturel
度百歲乃去
Et, centenaires, s’en allaient

Y aurait-il, en Chine, une idée de la personne qui ne permettrait pas d’isoler le corps ? Pourquoi donc a-t-on ce sentiment que l’on ne parle jamais vraiment du corps humain, qu il apparaît plutôt comme le support d entités plus vastes, qui le dépassent ? Comme si le corps ne pouvait être envisagé que d un point de vue énergétique, son fonctionnement assurant la vie en exacte correspondance avec le monde extérieur. Comme s’il n avait pas acquis un statut d’objet. Or, dans les différentes conceptions du corps en Chine, un point apparaît comme récurrent: ce va-et-vient entre les deux pôles de la représentation et du naturel, du symbolique et du réel, non pas l’un ou l’autre mais l’un et l’autre, indissociables en leur battement qui est celui même de la vie.


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