Les membres inférieurs, comme beaucoup d’autres parties du corps, doivent assurer plusieurs fonctions différentes, parfois même apparemment contradictoires :
- un rôle antigravitaire et d’appui (comme deux racines) pour la stabilité et la solidité de la posture ;
- une tâche plus subtile, intermédiaire entre posturale et dynamique, dans le redressement et le déroulement du corps en verticalité, avec la pression active des pieds au sol en repousser induisant, par le réflexe tonique postural, un allongement de la colonne vertébrale et la soutenant dans son auto grandissement ;
- la mission dynamique de la locomotion, de la mobilité dans l’espace.
De nouveau, afin de faciliter la description de cette partie du corps, les différents segments ou points articulaires en seront abordés séparément avant d’être ensuite, dans le souci de toujours reconstruire une vision dynamique et globalisante du corps, considérés dans leur unité fonctionnelle.
Pied et cheville
Ils assurent le rapport direct avec le sol, de façon plus ou moins subtile et… « intelligente »…, en fonction de la valorisation de leurs richesses proprioceptives et motrices.
Cheville
Elle établit le carrefour entre l’axe vertical du corps et l’axe horizontal pied / sol.
Les rapports osseux en sont l’ensemble tibia / péroné (fibula), au niveau des malléoles (la « pince malléolaire »), avec l’astragale (talus) : la tibio-tarsienne (talo-crurale).
De par cette conformation articulaire, il est classiquement considéré un seul paramètre de mouvement en flexion / extension (les autres paramètres sont tout à fait minimes en ce qui concerne leur amplitude mais vont permettre la participation non négligeable de la cheville à la mobilité globale du pied) :
- flexion (appelée encore « flexion dorsale ») par le jambier ant. (tibial ant.) – l’extenseur des orteils (long ext. des orteils)
- extension (ou « flexion plantaire ») par le jambier post. (tibial post.) – le triceps sural – le fléchisseur des orteils (long flech. des orteils) – les péroniers (fibulaires)
[ les termes de « flexion dorsale ou plantaire » devraient, en toute rigueur, être réservés à la dénomination des mouvements du tarse afin de les distinguer de ceux de la cheville… on admet leur usage pour la cheville également…]
Les fléchisseurs plantaires sont en plus grand nombre, de par la nécessité de déployer davantage de force dans la phase de propulsion de la marche, par rapport à la phase de réception ; propulsion pendant laquelle la cheville effectue un mouvement d’extension.
Ce surnombre des fléchisseurs plantaires permet également la compensation du léger déséquilibre antérieur du corps en position debout ainsi que, par ailleurs, une stabilisation active de la cheville elle même (avec resserrement de la pince malléolaire) comparativement plus instable en extension.
[ Attention à la terminologie : de par l’usage admis du double vocabulaire évoqué plus haut, muscles « extenseurs » et « fléchisseurs plantaires » deviennent alors similaires !…]
Les disfonctionnements de la cheville sont, le plus fréquemment, d’origine :
- fonctionnelle simple, avec de fréquentes raideurs dues au raccourcissement du triceps.
- traumatique dans l’entorse, souvent externe (étirement, voire déchirure du ligament lat.ext.)
Pied
Le pied garantit le contact au sol, sert de base de construction du corps et de « prise d’appui » (fonction plus active que passive…), avec une plus ou moins grande sécurité, une plus ou moins grande… « garantie »…
[ même les nourrissons, ne pratiquant pas la station debout ni la marche encore, peuvent se sentir sécurisés par un contact sur la plante des pieds…]
Au niveau du pied, les fonctions sensitives tant qu’actives sont essentielles, pour la posture autant que pour le déplacement, dans l’adaptation des appuis du corps au sol en vue de l’équilibration globale et des ajustements fins de la posture permettant de conserver la disponibilité de mouvement.
Rappels anatomiques
- plan osseux
- tarse, métatarse, phalanges…, le tarse postérieur étant formé du calcanéum (calcanéus) et de l’astragale (talus) en position superposée / verticale, le tarse antérieur s’ordonnant plus horizontalement pour se prolonger ensuite dans le « rayonnement » des métatarsiens puis des phalanges ; le passage verticale / horizontale, se fait entre la jambe et le pied mais se retrouve donc aussi dans la structure interne du pied.
- niveau articulaire
-
- sous-astragalienne (subtalaire), entre astragale (talus) et calcanéum (calcanéus)
- médio-tarsienne (transverse du tarse), entre tarse post. et tarse antérieur
- plan musculaire
- en envisageant les principaux muscles seulement, pour les mouvements globaux pied / cheville étudiés plus loin :
- jambiers (tibiaux) ant. et post., long fléchisseur des orteils ⇒ « inversion »
- péroniers (fibulaires) ant. et latéraux, long extenseur des orteils ⇒ « éversion »
Physiologie / mobilités
Le contact du pied au sol se fait selon une surface dont l’aspect varie en fonction de la morphologie ou de la dynamique du pied (plus ou moins étalé) ; les zones d’appui, quant à elles, représentent les zones de plus grande pression et correspondent à trois points principaux : calcanéus (talon), tête du 1er métatarsien et tête du 5ème méta., entre lesquels 3 arches se dessinent :
- l’arche interne entre le talon et le 1er méta. (la plus marquée et dotée d’un rôle dynamique)
- l’arche externe entre le talon et le 5ème méta. (à rôle plus statique)
- l’arche antérieure entre le 1er et le 5ème métas
Ces arches font un véritable travail de ressort et permettent d’amortir les impacts du poids du corps sur le sol, lors de la marche notamment (des arches fixées en affaissement ou en position creuse, avec perte d’élasticité, n’assurent plus cette charge…)
La répartition du poids du corps sur ces trois points d’appui varie avec le type de posture :
- position neutre (poids légèrement plus en arrière)
[ 60 % du poids sur arrière-pied, 40 % sur avant-pied…] - position installée / de repos (poids nettement plus en arrière)
[ 70 % en arrière, 30 % en avant…] - position dynamique (poids égal entre avant et arrière) autorisant une mobilisation (vers l’avant…) plus « accessible » et donc plus facile ou rapide ; cette position correspond à un certain degré d’« éveil musculaire » préparatoire au mouvement…
La chaîne cinétique principale du pied concerne les articulations talo-crurale, sub-talaire et transverse, ainsi que l’ensemble du « 1er rayon » ou arche interne.
Les différents mouvements de flexion-extension, abd.-add., rotations int. et ext. (médiales et latérales), possibles au niveau du tarse, se combinent de façon particulière pour donner les deux mouvements globaux du pied, associés à ceux de la cheville :
- Inversion ⇒ flexion plantaire + adduction + rotation externe (latérale) ou « supination » ; par l’action des muscles situés en postéro-interne (postéro-médial) ; elle correspond à un « pied creux » avec une arche interne (médiale) haute.
- éversion ⇒ flexion dorsale + abduction + rotation interne (médiale) ou « pronation » ; par l’action des muscles situés en antéro-externe (antéro-latéral) ; elle correspond à un « pied plat » avec une arche interne (médiale) affaissée.
Ces deux mouvements d’inversion et d’éversion réalisent en fait un mouvement de torsion entre l’arrière-pied et l’avant-pied, permettant l’ajustement subtil des 3 points d’appui du pied au sol et la fonction de ressort.
Le problème le plus fréquemment rencontré est celui du pied plat, arche interne (médiale) affaissée (et cheville en « valgus ») ; le « vrai » pied plat étant dû à un manque de tonicité et d’activité de la musculature plantaire, à ne pas confondre avec un « faux pied plat », dû à une mauvaise gestion de la gravité sur l’appui et correspondant souvent à une activité posturale globale adynamique.
Une autre affection fréquente du pied est représentée par l’hallux valgus dans lequel le gros orteil subit de façon progressive une déviation vers l’axe du pied, avec proéminence (plus ou moins douloureuse…) de la jonction tête du 1er méta./ base de la 1ère phalange.
Genou
Cette articulation intermédiaire du membre inférieur assure les variations de la distance entre le corps et le pied, ou le sol…
Ce rapport articulaire se fait par la jonction fémoro-tibiale essentiellement, dont la congruence, plutôt faible, est un peu augmentée par la présence des ménisques ; la fémoro-patellaire vient compléter cet ensemble mécanique (sert de poulie de réflexion pour le tendon rotulien / quadriceps).La construction de cette articulation en deux compartiments va avoir une incidence singulière sur sa mobilité ainsi que sur sa stabilité. Il existe en effet une différence entre les compartiments interne (médial) et externe (latéral) de la cavité articulaire du genou et portant sur :
- la concavité des plateaux tibiaux,
[ l’interne (médial) est plus concave ce qui donne une stabilité un peu plus importante au niveau du compartiment interne (médial)] - le rayon de courbure des condyles,
[ l’externe (latéral) est plus grand et les mouvements se font alors en « spirale »…]
Les mouvements du genou se développent en flexion / extension pour le paramètre principal, en petites rotations pour le paramètre secondaire :
- flexion / extension se font dans des mobilités de roulement / glissement des condyles fémoraux sur les plateaux tibiaux, avec une amplitude de mouvement légèrement plus importante sur le compartiment externe, induisant, pour partie, une légère rotation entre fémur et tibia.
flexion : ischio-jambiers – jumeaux int et ext. (gastrocnémiens méd./lat.)
extension : quadriceps (puissant…) - rotations : elles sont inexistantes dans de grande amplitude, cependant, des petites rotations du tibia sous le fémur sont possibles :
- en position de flexion seulement pour une mobilisation volontaire,
- en accompagnement, de façon automatique, des flexion / extension et en conséquence des conformations articulaires évoquées plus haut, tout comme des jeux musculaires :
rotation interne liée à la flexion (par les muscles de la patte d’oie)
rotation externe associée à l’extension (par le biceps)
(ces rotations associées déterminent certains positionnements particuliers des jambes et des pieds dans les positions accroupi ou à genoux par exemple…)
[ à genoux : les talons se positionnent vers l’extérieur, les orteils vers l’intérieur…
accroupi : l’axe des pieds est orienté plus en dedans que celui des genoux… si la position est correcte…
en décubitus dorsal, les pieds sont orientés un peu plus vers le dehors que les genoux…]
En posture debout, les forces de gravité (pressions transmises depuis l’axe vertébral vers les pieds via le bassin et les membres inférieurs) ainsi que les forces musculaires d’extension doivent respecter les axes de construction (architecturaux…) des ossatures afin que les articulations ne soient pas contraintes de travailler en « porte à faux ». L’équilibre du genou et sa bonne dynamique sont donc liés aux axes de référence du membre inférieur et aux alignements correspondants :
- en plan frontal (observation de face) : l’alignement coxo-fémorale / cheville est vertical si les pieds sont un peu écartés, est légèrement oblique en bas et dedans si les pieds sont joints.
Les lignes du corps fémoral et du tibia forment, elles, un léger angle fermé latéralement, de par l’obliquité en bas/dds du fémur ; il s’agit du « valgus physiologique » (normal). Ce positionnement peut subir des modifications, transitoires ou non, dans le sens :- de l’augmentation (passage en excès) constituant un « genu-valgum » (genoux portés « en dedans » et qui peuvent se toucher même si les pieds sont écartés, à ne pas confondre avec des genoux orientés vers l’intérieur par rotation interne (RM) des hanches…)
[ le genu-valgum provoque une mise en tension du ligament lat. int. (ou « ligt. collatéral tibial du genou ») et une augmentation de compression sur le compartiment externe de l’articulation…] - de la diminution, voire de l’inversion de cet angle, formant un « genu-varum » (attitude du cow-boy ou du footballeur…)
- de l’augmentation (passage en excès) constituant un « genu-valgum » (genoux portés « en dedans » et qui peuvent se toucher même si les pieds sont écartés, à ne pas confondre avec des genoux orientés vers l’intérieur par rotation interne (RM) des hanches…)
- en plan sagittal (observation de profil) : la coxo-fémorale, le genou et la cheville doivent être alignés dans la verticale (pour un positionnement de repos plutôt statique… mais dans une position debout plus dynamique, il est admis que l’axe joignant la coxo-fémorale et le genou passe très légèrement en avant de la cheville ; cf. plus loin : répartition du poids sur le pied…).
Le non alignement du genou par rapport à cet axe peut se faire en deux sens :- genou trop en avant, par perte de l’extension complète ; c’est un « flexum » (souvent maintenu par des tensions du plan postérieur)
- genou trop en arrière, par excès d’extension ; c’est un « récurvatum » (souvent signe d’une laxité ligamentaire)
La stabilité du genou, du fait du très faible emboîtement osseux, est assurée par la présence de la capsule et des ligaments (latéraux et croisés) ainsi que, en actif, par la musculature. Le « verrouillage » de genou, en extension complète (action du quadriceps), évite toute instabilité mais limite la capacité d’adaptation des appuis en dynamique.
De par sa position intermédiaire, le genou doit en fait absorber et équilibrer des forces descendantes venant de la hanche et des forces montantes venant du pied ; il peut être souvent excessivement contraint par cette rencontre si ces influences sont trop contradictoires…
Outre les problèmes d’arthrite et d’arthrose, les atteintes du genou peuvent concerner les différentes structures articulaires telles que la rotule (arthrose, malpositions…), les ménisques (lésion entraînant le blocage de l’articulation…), les ligaments (internes ou externes, avec distension ou rupture dans les entorses…). Mais les douleurs de genou peuvent être le signe d’une atteinte fonctionnelle seule quand l’articulation est obligée de trouver les compromis de fonctionnement évoqués plus haut, en désaccord avec sa conformation et sa physiologie propres, et susceptibles d’entraîner les malpositions décrites.
Bassin – Hanche
La ceinture pelvienne fait le lien, vertical, entre le tronc et le membre inférieur ; le bassin et les coxo-fémorales, dans un axe horizontal, règlent l’équilibre, la balance droite / gauche des appuis…
[Le terme de « hanche » utilisé ici, moins rigoureux mais toléré, désigne la coxo-fémorale]
La plus ou moins grande liberté des hanches permettra, de façon plus ou moins aisée, la mise en mouvement du corps dans la marche, dans le déplacement.
[ la bipédie humaine a entraîné des modifications morphologiques telles que l’élargissement du bassin, le creusement de la lordose lombaire et le développement des fessiers… et le report de tout le poids du corps sur ces deux seuls appuis des membres inférieurs engendre un travail musculaire important dans les hanches…]
Hanche
La conformation sphérique de l’articulation coxo-fémorale, où la tête fémorale est emboîtée dans le cotyle de l’os coxal, donne des possibilités de mouvement dans les trois directions de l’espace avec des amplitudes importantes dans un champ antéro-supéro-externe, beaucoup moindres vers l’arrière dans l’extension, et ce grâce à la présence du col fémoral (d’autant plus qu’il est verticalisé…).
Les mouvements du fémur sur le bassin sont les flexion / extension, les abduction / adduction et les rotations int. / ext. (médiales et latérales).
Cependant, dans la mobilité usuelle, la « fixité » du bassin reste relativement théorique et les mouvements de hanche font plutôt partie de chaînes cinétiques (coordinations plus globales, à différencier des mobilités de bassin sur appui fixe, en chaîne fermée) et y associent la mobilité du bassin et des lombaires dans des paramètres préférentiels :
- la flexion de hanche, entraînant une rétroversion de bassin et une délordose lombaire ; et qui est alors aussi plus ample si le genou est lui même en flexion.
- l’extension de hanche, entraînant une antéversion de bassin et une hyper lordose lombaire ; et qui est alors aussi plus ample si le genou est lui même en extension.
La position de fonction de cette articulation (position de relatif équilibre des jeux musculaires, de confort, et permettant ici un maximum de couverture de la tête fémorale…) combine une flexion (d’environ 90°), une petite rotation externe (latérale) et une petite abduction (et correspond à sa situation en position quatre pattes).
L’axe horizontal des deux hanches doit garantir l’équilibre de la ceinture pelvienne dans son ensemble :
- dans le sens latéral ou D / G (équilibre des adducteurs / abducteurs),
- dans le sens antéro-postérieur (par les antéverseurs / rétroverseurs ou fléchisseurs / extenseurs de hanche).
Ces équilibres sont les garants de la stabilité du bassin lui même mais aussi, par suite, de l’harmonisation des courbures de la CV et de sa verticalité.
Dans l’axe vertical, les hanches représentent les deux points d’appui et d’articulation du tronc sur les membres inférieurs, avec passage de une (axe vertébral) à deux (axes des jambes) lignes de gravité, et transmission de ces forces verticales.
La connexion entre les jambes et le tronc passe, sur le plan ostéo-articulaire, par les sacro-iliaques et sur le plan musculaire par le psoas, muscle essentiel reliant directement la jambe à la colonne et lui-même connecté au diaphragme (imbrication avec ses piliers).
La hanche est dotée de nombreux muscles puissants, sollicités pour la stabilité autant que pour la mobilité, et se trouve être, en conséquence, le lieu de fréquentes tensions musculaires (au niveau des quadriceps, des ischio-jambiers, des adducteurs et des psoas…le plus souvent…).
La hanche peut être le siège des affections articulaires déjà évoquées : arthrose (« coxarthrose ») et arthrites, ou encore de malformations congénitales. Par ailleurs, chez la personne âgée, la déminéralisation osseuse fragilise plus particulièrement le col du fémur, avec risques accrus de fractures.
Bassin
Cet anneau osseux, sorte de « coupe » (bassine), ouvert sur le haut et l’avant, est constitué des deux os iliaques (os coxaux) latéralement et du sacrum en arrière. Deux espaces y sont dessinés par les lignes innominées des iliaques et le promontoire sacré (partie antérieure du plateau), formant ensemble le détroit supérieur :
- le grand bassin en haut (entre les ailes iliaques),
- le petit bassin en bas (entre les ischions latéralement ; le sacrum et le pubis d’arrière en avant), et dont la partie inférieure est fermée par le périnée (musculature du plancher pelvien).
Les différents rapports articulaires, au niveau de la ceinture pelvienne, entre iliaques, sacrum, lombaires et fémurs, déterminent des mobilités concernant :
- le bassin lui-même (entre iliaques et sacrum), décrites sous le terme de « physiologie interne »,
- l’ensemble du bassin avec son entourage (colonne et membres inférieurs), décrites sous le terme de « physiologie externe ».
Physiologie « interne » du bassin
Elle concerne donc les mouvements entre iliaques et sacrum, rendus possibles grâce aux trois jonctions mobiles (et non soudées…) des :
- symphyse pubienne (avec un joint fibro-cartilagineux) autorisant de petits glissements et une certaine élasticité.
- sacro-iliaques D et G, entre chacun des iliaques et le sacrum (avec articulation « vraie ») où sont possibles des mouvements (et il s’agit aussi de la plasticité de ce rapport entre les deux pièces osseuses), de très faible amplitude, mais essentiels…
Cette mobilité, même minime, donc, dans ses amplitudes, est associée à tous les grands mouvements de bassin et de hanche, pour en permettre les ajustements plus subtils… :
- l’iliaque (os coxal) y réalise des mouvements dits de « rotation antérieure » ou de « rotation postérieure », combinant, en fait, trois paramètres de mouvement autour de l’axe articulaire de la sacro-iliaque elle même, et donnant, comme résultante globale, pour une rotation antérieure, une « ouverture » de l’aile iliaque vers le haut et l’avant et une fermeture de l’ischion vers le dedans et l’arrière (inverse dans la rotation post.).
La rotation antérieure associe les paramètres (qui seront donc inverses pour la rotation post.) :- flexion : mouvement de bascule de l’aile iliaque vers l’avant et de l’ischion vers l’arrière,
- éversion, ou abduction de l’aile, adduction de l’ischion,
- et rotation externe (latérale) avec écartement de l’EIAS de l’axe, rapprochement de l’EIPS.
- le sacrum, lui, y réalise un mouvement de balancier entre avant et arrière : « flexion » quand la base va vers l’arrière et le coccyx vers l’avant, « extension » à l’inverse…
Dans l’articulation sacro-iliaque, le sacrum peut donc être mobilisé par rapport à l’iliaque, supposé point fixe ou, à l’inverse, l’iliaque peut être mobilisé par rapport au sacrum supposé fixe. La réalité du mouvement veut cependant que la fixité de l’une des deux pièces osseuse soit relative et que, la plupart du temps, les deux os « bougent » en même temps mais dans des directions opposées (ou plus précisément subissent des influences et tractions d’orientations opposées). Si donc, pour une mobilisation de la sacro-iliaque, le sacrum est entraîné en flexion, l’iliaque le sera dans le sens de sa « rotation antérieure » ; l’extension du sacrum étant alors associée, elle, à une « rotation postérieure » d’iliaque. En considérant maintenant les deux sacro-iliaques ensemble (il est rare que l’une des deux soit seule en mouvement), deux situations types sont possibles :
- les deux iliaques sont mobilisés symétriquement, dans le même sens, et il en résulte alors un mouvement global :
- de fermeture du grand bassin (entre les deux ailes iliaques et la base du sacrum) et ouverture du petit bassin (entre les ischions et le coccyx) s’il s’agit de rotation postérieure d’iliaque avec extension du sacrum ; ce mouvement d’ensemble est nommé « nutation ».
- d’ouverture du grand bassin (entre les deux ailes iliaques et la base du sacrum) et fermeture du petit bassin (entre les ischions et le coccyx) s’il s’agit de rotation antérieure d’iliaque avec flexion du sacrum ; ce mouvement d’ensemble est nommé « contre nutation ».
Ces mouvements de nutation / contre nutation ont un rôle primordial dans l’adaptation du bassin pendant l’accouchement, la contre nutation accueillant l’engagement du fœtus au niveau du détroit supérieur, la nutation facilitant son passage du détroit inférieur dans l’expulsion.
- les deux iliaques sont mobilisés de façon asymétrique, l’un en rotation antérieure, l’autre en rotation postérieure, et le sacrum doit alors adapter cette double influence, dans une torsion qui va être le reflet de celle du bassin dans son ensemble. Cette situation est, en fait, extrêmement fréquente puisqu’elle est le résultat d’influences dissymétriques sur les iliaques. En effet, en dehors de la musculature du périnée, il n’y a pas de muscles moteurs directs des mouvements des sacro-iliaques ; iliaque et sacrum sont mobilisés l’un par rapport à l’autre par les différentes musculatures qui s’insèrent sur chacun d’eux, les muscles du membre inférieur influençant l’iliaque et les muscles du tronc influençant le sacrum ; or l’activité des membres inférieurs est bien plus souvent dissymétrique que symétrique, ne serait-ce que lors de la marche.
Physiologie « externe » du bassin
Elle recouvre donc les mouvements de l’ensemble du bassin par rapport aux éléments adjacents, à sa « périphérie », et ce grâce aux articulations :
- charnière L5 / S1 entre le sacrum et les lombaires (représentées par la 5ème).
- coxo-fémorales entre les iliaques et les fémurs.
Par rapport à la colonne et aux membres inférieurs, supposés points fixes, les mouvements du bassin sont réalisés selon les trois paramètres de base.
Une première particularité concerne la « participation » des lombaires aux mouvements du bassin, tenant au fait que le mouvement en L5 / S1 reste minime en amplitude et que sa diffusion sur l’ensemble des lombaires autorise une mobilité plus ample dans l’espace pour le bassin lui même (il s’agirait là du principe de la « chaîne cinétique », au service d’un même mouvement… et l’accompagnement des lombaires pourrait alors être considéré comme faisant partie du mouvement du bassin…).
Une deuxième particularité tient au fait que les mouvements du bassin se font, selon les paramètres, de façon symétrique ou dissymétrique par rapport aux deux appuis.
Les différents mouvements seront donc décrits ici en référence à ce qui se passe dans les articulations des hanches, en tenant compte du fait que les points fixes sont alors inversés, comme en miroir par rapport à une mobilité du fémur sur l’iliaque :
- antéversion (version du bassin vers l’avant…) : correspondant à un « état » de flexion de hanche et une lordose lombaire ; par l’action des para vertébraux, du psoas iliaque, et/ou du droit antérieur (droit fémoral).
- rétroversion (version du bassin vers l’arrière…) : correspondant à une situation d’extension de hanche et de délordose lombaire ; par l’action des abdominaux, ischio-jambiers et/ou des fessiers.
- inclinaison latérale, droite ou gauche, correspondant à une abduction de hanche du côté de l’inclinaison, adduction du côté opposé et à une inclinaison lombaire controlatérale à celle du bassin ; par l’action des muscles abducteurs/adducteurs (et/ou muscles latéraux du tronc entre thorax et bassin)
[ nommée « inclinaison latérale externe » sur l’appui du côté de l’inclinaison, « inclinaison latérale interne » sur l’autre appui…
par exemple : une inclinaison droite du bassin correspond à une inclinaison externe sur la jambe droite et à une inclinaison interne sur la gauche… ] - rotation, droite ou gauche, correspondant à une rotation médiale de hanche du côté de la rotation, rotation latérale du côté opposé et à une rotation lombaire opposée à celle du bassin ; par l’action des pelvi-trochantériens (rotation latérale) / petit fessier, droit interne (muscle gracile) et/ou TFL. (rotation médiale).
[ nommée « rotation interne » sur l’appui du côté de la rotation, « rotation externe » sur l’autre appui…
par exemple : une rotation droite du bassin correspond à une rotation interne sur la jambe droite et à une rotation externe sur la gauche…]
Les physiologies interne et externe du bassin, ainsi décrites, ne restent pas totalement indépendantes l’une de l’autre et s’inter influencent en fonction des points de départ des différentes actions. Une antéversion peut, par exemple, être guidée par l’action du quadriceps, avec influence directe sur l’iliaque en rotation antérieure et correspondant alors à une contre nutation ; cette même antéversion peut être guidée par les para vertébraux, avec influence directe, cette fois ci, sur le sacrum en extension et correspondant à une nutation…
[ la déduction de ce type d’observation étant qu’il est impossible d’isoler une action articulaire et que seuls certains artifices viennent au secours de la description parfaitement analytique… toute mobilité est « relative »… et prise dans une trame d’autres mobilités…]
Le bassin sert donc de relais entre le haut et le bas du corps, avec la convergence
- de forces montantes, venant des appuis, par l’os coxal,
- de forces descendantes, venant du tronc (et plus spécifiquement de la tête et du regard, en relation dynamique constante avec l’extérieur), par le sacrum.
Ces forces se rencontrent au niveau des sacro-iliaques qui doivent rester mobiles pour les permanents ajustements et adaptations nécessaires aux mouvements… La fonction posturale globale de stabilité du bassin ne peut d’ailleurs se faire que dans cette mobilité minimale d’adaptation (et non dans la rigidité), le passage devant être laissé pour les interactions constantes entre le haut et le bas, ce qui demande également à ce que les lombaires elle mêmes soient libres de permettre et transmettre le mouvement et ne soient ni en hyper lordose, ni en délordose.
Le bassin est donc un centre de stabilité, un centre musculaire reliant les extrémités, un centre aussi de mouvement en ce sens que, « abritant » le centre de gravité, il va précéder, en pré-mouvement, tout mouvement de l’ensemble ou d’une autre partie du corps. Il est lieu de liaison, de centration, de concentration de la vitalité, jusqu’à hériter, même, de ce « cœur au ventre »…
[ Dans les bilans ostéopathiques chez des personnes extrêmement fatiguées ou dépressives, le sacrum est très fréquemment figé, en perte de mobilité…]
Dynamique globale du membre inférieur
La chaîne cinétique complète du membre inférieur comprend les trois articulations principales hanche, genou et cheville, ainsi que les articulations sacro-iliaques et astragalo-calcanéennes ayant pour mission les ajustements fins et les transmissions.
Les grands schémas de mouvements spiralés résultent de la coordination de ces articulations, avec alternance de rotations externes / internes opposées entre les différents segments, que le membre travaille en « chaîne fermée » (pied en appui) ou en « chaîne ouverte » (sans appui).
Cette véritable circulation du mouvement entre bassin et pied alimente la dynamique de la marche, dans une alternance des appuis. Le pied lui même, au cours du déroulement du pas, va développer un mouvement spiralé, dans la succession des points de pression : talon, bord externe et tête du 1er méta, et dans le mouvement alternatif d’inversion / éversion. Mais cette spirale ne s’arrête pas au pied, ni même à la hanche, et se transmet au bassin ainsi qu’à tout le reste du corps ; la marche est peut-être le plus bel exemple de l’unité corporelle dans le mouvement et dans cette dynamique en spirale qui le sous-tend…
Le mouvement alternatif des membres inférieurs, dans sa dissymétrie d’influences sur le bassin, va entraîner ce dernier en torsion (torsion répercutée sur les sacro-iliaques) et va également induire des mouvements globaux du bassin, dans les trois paramètres de l’espace. Cette mobilité de la ceinture pelvienne va, à son tour, être transmise à la colonne, en mouvements compensatoires permettant la conservation de l’équilibre (et l’économie). Le paramètre le plus évident de cette participation est celui de la rotation, transmise à la ceinture scapulaire puis aux bras, dans leur balancement opposé à celui des jambes. Bien évidemment, la tête représente aussi un autre aboutissement de cette « onde de mouvement » et si, dans l’observation d’une personne en marche, la mobilité de la tête, minime en amplitude, n’est souvent pas repérée d’emblée, son absence, elle, devient parfois flagrante, signifiant toute la raideur cervicale qui inhibe cette participation.
[ Marcher a la même fonction dynamisante sur le corps que la succion pour le crâne chez le nourrisson et que, ultérieurement, le fait de « mâcher »… certaines personnes peuvent être aussi peu dynamiques – ou parfois aussi bien hyperactives – dans leur rapport au sol au cours du déplacement que dans leur rapport à la nourriture au cours de la mastication…]
Outre l’évidente alternance droite / gauche de la marche, une autre alternance existe, pour chaque pas, entre les deux phases de propulsion et de réception. La propulsion correspond au temps, particulièrement actif, où le pied arrière repousse le sol pour engager l’ensemble du corps dans le déplacement vers l’avant, avec extension de tout le membre inférieur aux différents niveaux articulaires. La réception correspond au temps où le poids du corps va être accueilli sur l’appui antérieur, avec flexion des articulations pour amortir (adoucir) cette arrivée au sol. Entre ces deux temps, un bref moment de déséquilibre, de suspension, et pendant toute la phase du pas, le déplacement quasi linéaire du centre de gravité vers l’avant…
La multiplicité des mouvements entrant en jeu dans cette coordination de la marche fait qu’à chacun de ces niveaux pourront s’exprimer des particularités individuelles, soit dans l’aspect d’amplitude de participation de telle ou telle zone, soit dans l’aspect qualitatif des réalisations (énergie plus propulsive ou réceptrice, caractère du contact du pied avec le sol, orientation des dynamiques partielles.. etc…). La marche devient une des signatures de la façon personnelle de bouger, s’exprime en « démarche » personnelle…