Émotion

Dans le dictionnaire Le Robert (1993), « émotion » est un mot issu de « motion » qui concerne le mouvement, terme apparaissant au XIIIe siècle en français comme en langues saxonnes et portant l’idée d’un mouvement qui s’accomplit ; la racine latine emovere signifiant « mettre en mouvement ». L’émotion va exister au début du XVIe siècle par le mot « esmotion » qui induira la signification utilisée actuellement : l’émotion est un état de conscience complexe, généralement brusque et momentané, accompagné de signes physiologiques (par exemple : rougissement, sudation). Tous les signes corporels de l’émotion dépendent de l’activité du système sympathique ou parasympathique sous l’excitation des zones thalamiques, elle possède donc de profonds points de liaisons physiologiques. La sensation ou l’état affectif agréable ou désagréable est retenu par le sujet comme étant le marqueur de son état émotionnel mais aussi somatique.

La place du corps comme entité vécue par le sujet est plus évidente dans l’article de l’Encyclopædia Universalis (1976) où la physiologie de l’émotion longtemps privilégiée par la science ouvre sur la psychologie des émotions. Notamment avec l’idée de l’émotion comme « mode de comportement » (Claparède, 1931) qui favorise l’adaptation pour la vie, et avec la notion de « conduite de l’émotion » que Janet (1929) développe pour initier une approche de l’émotion bio-physio-psychologique admise implicitement actuellement. Selon l’Encyclopædia Universalis, on retient que les travaux des années 1940 à 1960 sont plutôt de type behavioriste où l’émotion est assez systématiquement conçue comme réaction à une situation : atypique et/ou inquiétante, surprenante, engageante (émouvante) pour l’individu, qu’il soit enfant ou adulte, humain ou mammifère animal. L’idée d’une émotivité propre à chaque personne malgré la réalité d’émotions primaires ontogénétiques, puis celle de l’émotion conçue comme conduite d’ensemble physio-psychologique, puis l’idée que l’émotion ne peut être interprétée qu’en contexte singulier (notamment social et relationnel) apparaissent toutes trois fondatrices de la conception actuelle des émotions.

L’émotion, avec ses « réactions souvent intenses », est systématiquement présente dans les arts visuels, travaillée, traquée, déclinée. Elle incarne même la plus grande partie de leur sens, suggérant la chair, stimulant la curiosité. Toutes les expressions y sont illustrées : de la souffrance à la joie, de l’enthousiasme à la terreur, du plaisir à la douleur … 

Extrait du site de l’exposition : « Le théâtre des émotions », au musée Marmottan Monet, Paris

Il existe un lien étroit entre émotions et sentiments. Les premières sont des réactions intenses et spontanées à des stimuli externes ou internes, tandis que les seconds correspondent à des expériences émotionnelles plus durables et complexes qui peuvent être influencées par nos pensées, nos croyances et notre expérience personnelle.

De la même manière, émotions et sensations entretiennent des rapports étroits : les émotions peuvent engendrer des sensations physiques dans le corps (battements de cœur accélérés, respiration rapide, tensions musculaires, …), inversement, les sensations peuvent influencer nos émotions (des stimuli agréables peuvent déclencher des émotions positives telles que la joie ou le contentement).

Une émotion est une réaction psychologique et physique à une situation. Elle a d’abord une manifestation interne et génère une réaction extérieure. Elle est provoquée par la confrontation à une situation et à l’interprétation de la réalité. En cela, une émotion est différente d’une sensation, laquelle est la conséquence physique directe (relation à la température, à la texture…). La sensation est directement associée à la perception sensorielle. La sensation est par conséquent physique. Quant à la différence entre émotion et sentiment, celle-ci réside dans le fait que le sentiment possède une durée plus longue qu’une émotion qui quant à elle est un changement d’état d’âme, l’émotion arriverait avant le sentiment.

Peur, joie, dégoût, tristesse, colère, surprise sont considérés comme les six émotions fondamentales en Occident, dites aussi primaires ou encore darwiniennes selon les auteurs et par opposition aux variations subtiles qui instaurent des émotions liées aux contextes sociaux et relationnels complexes (e.g. honte, envie, amour, empathie).

Les émotions pour la médecine traditionnelle chinoise

En médecine chinoise, les émotions figurent parmi les « attaques internes », c’est-à-dire qu’elles sont considérées comme des perturbateurs de notre organisme.

La joie La joie ne fait de mal à personne, bien au contraire. C’est l’émotion vers laquelle il faut essayer de tendre, le plus souvent possible.
En médecine chinoise, le déséquilibre provient soit d’une joie en excès – c’est-à-dire l’euphorie provoquée par une perturbation psychologique – soit d’une insatisfaction permanente. Ces deux états touchent particulièrement l’esprit (神 shén) et l’énergie du cœur (心 xīn).
La tristesse bēiLa tristesse est une émotion qui induit un repli sur soi. Elle nous indique qu’un deuil doit être fait et elle nous invite à prendre soin de notre besoin d’acceptation. Elle affaiblit particulièrement l’énergie du poumon (肺 fèi).
La peur kǒngLa peur est une émotion qui paralyse. Elle nous indique un sentiment de danger. Lorsque nous avons peur c’est que nous ne nous sentons pas en sécurité. Elle bloque l’énergie des reins (腎 shèn) et de la vessie (膀胱 páng guāng) et l’épuise.
La colèreLa colère est une émotion mal aimée car elle peut être violente. La colère c’est comme une cocotte posée sur le feu du temps qui chauffe et qui finit par exploser s’il y a eu accumulation. Nous avons intérêt à apprendre à clarifier nos colères, à les identifier et à les exprimer, à temps, dans la bonne mesure et à la bonne personne.
Elle nous parle de notre besoin d’écoute, de compréhension, de reconnaissance, d’avoir sa place. Elle bloque l’énergie du foie (肝 gān) créant une stagnation du souffle (氣 qì) dont les conséquences peuvent être graves.

Les soucis
Les soucis sont nos ruminations mentales. La part d’obligations que nous ingurgitons en trop grande quantité et que nous n’arrivons pas à digérer. Les soucis vont déstabiliser l’énergie de la rate et de l’estomac.
Les émotions pour la médecine traditionnelle chinoise


Chaque émotion met en lumière un besoin dont il faut s’occuper. Plus une émotion persiste, plus le déséquilibre est grand.


  • L’émotion – Philippe Claudon, Margot Weber dans Devenir 2009
  • Mémoire et émotions, Francis Eustache, Le Pommier, 2016
  • Pathologies du corps émotionnel et de la psyché en médecine traditionnelle chinoise : Stratégies diagnostiques et thérapeutiques de Dr Tuan Anh Tran
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