Le cœur vide

Traduction d’un article de maître Nigel Sutton paru le 7 mars 2019 dans Facebook : The Empty Heart

Je parlais à un Moine Zen l’autre jour et la question du cœur vide a été soulevée. C’est un concept clé dans le bouddhisme zen et c’est aussi un concept clé dans tous les arts martiaux d’Asie de l’Est et du Sud-Est que j’ai expérimentés. C’est rarement un sujet pour les débutants, mais il arrive un moment où cela devient primordial. Lorsque le physique a été exploré, entraîné et peut-être même poussé jusqu’à ses limites, c’est parti ; il faut développer le cœur vide.

Dans le taijiquan, comme dans de nombreux autres arts martiaux, cela se développe par la méditation et Maître Zheng catégorise cela comme étant une partie essentielle de la troisième étape ou étape céleste de l’entraînement. Maître Koh décrit la pratique de la forme taijiquan comme étant le meilleur type de méditation.

Curieusement, ma première rencontre avec la méditation est survenue lors de la pratique du karaté japonais. Chaque séance d’entraînement commençait et se terminait parfois par une courte période de méditation à genoux. Bien sûr, aucun de nous, les juniors, n’était particulièrement intéressé, nous voulions nous améliorer en coups de pied et en coups de poing. La fondation, cependant, était posée.

Tous mes professeurs ont souligné l’importance d’une sorte de pratique méditative et contemplative et en recommandent souvent une qui découle de leur propre culture ou orientation spirituelle. Ils le recommandent tous car une telle pratique est une partie vitale de leur propre entraînement quotidien. Ce qu’ils recherchent, c’est un état d’esprit et d’esprit qui s’incarne. En taijiquan, nous pourrions parler de chant (relaxation alerte) ou de jing (immobilité), en silat, cela s’appelle Ba ou acceptation, dans d’autres styles, cela pourrait s’appeler l’état d’esprit de combat optimal. Dans les arts qui ont leurs racines culturelles et philosophiques dans la spiritualité est-asiatique, l’état est appelé le cœur vide.

Quel est donc ce cœur vide que nous recherchons à travers des pratiques méditatives ? Des volumes auraient pu et ont été écrits en réponse à cette question et beaucoup ont consacré leur vie entière à chercher une réponse. Dans cet esprit, la description en pot donnée ici doit nécessairement être un petit aperçu d’une vaste perspective. Le cœur vide est un état où la conscience est épurée par le jugement, ouverte, acceptant, complètement immobile. Notre premier point d’entrée pour développer un peu ce zhong ding de l’esprit vient lorsque nous essayons de développer une attitude qui ne porte pas de jugement : les gens, les événements, les souvenirs, les émotions ne sont ni bons ni mauvais en soi. Ils apparaissent dans des contextes qui peuvent les faire apparaître très clairement l’un ou l’autre, mais cela n’est pas utile à celui qui cherche à incarner le cœur vide.

Pour mettre ce qui précède en termes plus concrets : si nous entrons dans une situation que nous pensons être dangereuse et voyons l’énorme homme laid qui ressemble à un voyou et qui est, comme nous le voyons, évidemment la source de ce danger, nous pourrions bien manquer la personne au visage d’ange avec le couteau ensanglanté à la main ! Vous obtenez l’image.

Notre vie et notre formation nous offrent d’innombrables opportunités pour développer ce sentiment de vide de cœur. De plus, notre méditation et notre entraînement quotidiens, abordés avec la même attitude, approfondissent davantage notre capacité à développer le cœur vide.

En tant qu’artistes martiaux, lorsque nous réalisons qu’un tel entraînement est vital pour notre progrès, nous commençons à comprendre qu’il n’y a pas d’ennemis extérieurs ; il n’y a que ce qui est en nous et qui empêche notre développement continu. En Occident, nous appelons cela l’ego, en silat cela s’appelle le nafs, dans certaines traditions c’est satan. Dans le taoïsme, cela pourrait être considéré comme tout ce qui empêche de réaliser que nous faisons partie du dao, nous sommes dans le courant.

Sur la voie martiale, ainsi que les pratiques elles-mêmes, nous avons un soutien supplémentaire de notre communauté martiale. Il ne s’agit pas seulement pour nos frères et sœurs de nous féliciter, de nous encourager ou de nous aider à nous relever après une chute, que ce soit littéralement ou métaphoriquement. Non, nos frères et sœurs qui nous aident le plus sont souvent ceux que nous n’aimons pas vraiment : ils sont méchants en combat, trop durs aux mains poussantes ou ils essaient d’entraver notre progression ou de perturber notre harmonie d’une manière ou d’une autre. Ce sont eux qui nous donnent l’opportunité de vider nos cœurs ; de voir, de s’engager et d’agir sans aucun jugement de bien ou de mal. Devant eux, nous devons nous incliner profondément, respectueusement et sincèrement.

Quel est alors le résultat pratique de tout ce nombrilisme « spirituel » ? Relâchement (松 sōng) et calme s’accroissent, les réactions sont plus rapides, une meilleure capacité à utiliser toute la puissance à notre disposition, en fait une plus grande puissance, le développement du ting jing, du dong jing et de tout ce qui va avec. Tellement ! Et, comme pour tout ce que nous faisons dans les arts martiaux, ne me croyez pas sur parole, ni sur la parole de mes aînés, professeurs, la lignée etc …

Essayez-le par vous-même.

Accrochez-vous !

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