L’épée du taijiquan

Le professeur Cheng Man Ching pratique l'escrime

太极剑 tài jí jiàn

C’est une arme dite courte, à double tranchant, dont la taille varie entre 80 et 110 cm, et qui se manie d’une seule main.

Elle a une garde (剑格 jiàn gé) assez petite qui protège la main, une poignée (剑柄 jiàn bǐng ), et un pommeau (剑首 jiàn shǒu ), l’extrémité de la poignée la plus proche de nous qui sert de butée pour éviter à la main de glisser et qui, à l’occasion, peut aussi servir à frapper. Sur le pommeau se trouve le chas (剑眼jiàn yǎn) auquel est attaché le pompon (剑穗 jiàn suì) souvent de couleur rouge et dont les mouvements déconcentrent l’adversaire.

La lame (剑刃 jiàn rèn) se compose d’une pointe (剑尖 jiàn jiān)  pour les coups d’estoc, de l’arête (剑脊 jiàn jǐ), ainsi que des tranchants supérieur (上刃 shàng rèn) et inférieur (下刃 xià rèn) pour les coups de taille. On peut distinguer trois tiers dans la lame :

  • Le tiers côté poignée ( 后下刃 hòu xià rèn) est le plus épais et s’utilise pour bloquer des coups puissants en prenant garde de ne pas utiliser le tranchant, ce qui entraînerait une détérioration du fil de la lame.
  • Le tiers médian (中下刃 zhōng xià rèn) permet de couper profondément, de trancher, mais aussi de dévier un coup ou même de le bloquer s’il n’a pas trop de force.
  • Le tiers de la lame le plus éloigné de la main, côté pointe (前下刃 qián xià rèn) est la partie la plus souple, la plus fine. On ne l’utilise pas pour parer un coup, mais pour cisailler et lacérer ou pour des coups de pointe : ceux-ci ne sont efficaces que s’ils pénètrent dans l’axe de la lame.
Les parties de l'épée du taijiquan

剑訣 jiàn jué

Si la main droite tient une épée, la main gauche est vide. Avec les doigts on fait un « mudra », index et majeurs tendus et joints, les autres doigts repliés, pouce en-dessus. Ce mudra, épée magique du taoïsme, contribue à l’équilibre général du combattant.

Symbole de l’épée, on lui confère un sens énergétique. Au-delà de sa fonction d’équilibrage, il semblerait aussi qu’autrefois on combattait avec le fourreau de l’épée, on le tenait en posant les deux doigts en question dessus pour le contrôler. Le fourreau restait contre l’avant-bras, prêt à parer en cas de besoin.

Les locuteurs chinois font une distinction claire entre une « épée » (à double tranchant) et un « couteau » (à un tranchant). Dans la culture chinoise l’épée à double tranchant ou  剑 jiàn est considérée comme une arme de maître ou une arme de gentleman, à la fois du fait de l’habileté considérable requise pour combattre avec cette arme et du fait que les commandants d’armées ont favorisé le jian afin de se déplacer facilement parmi les troupes. Elle est décrite en chinois comme la «dame délicate» des armes, et est traditionnellement considérée comme l’arme la plus appropriée pour les femmes. Une épée à simple tranchant est appelée 刀 dāo. Le jian et le dao sont parmi les quatre armes principales enseignées en Chine, les autres étant le bâton et la lance. L’ordre dans lequel ces armes sont enseignées peut varier selon les écoles et les styles, mais le jian est généralement enseigné en dernier parmi les quatre.

On a pu voir, récemment, une discussion qui est récurrente sur la façon dont l’escrime chinoise dévie délibérément avec le plat de la lame. Certains aujourd’hui, ne connaissant pas les principes de l’art, mais désireux de pratiquer, empruntent la parade avec le bord de l’épée européenne. Il y a un certain nombre de raisons pour lesquelles 剑法 jiàn fǎ et 刀法 dāo fǎ évitent les parades bord sur bord. Ces raisons incluent la structure 三枚 sān méi (trois plaques) de la lame. La plaque à haute teneur en carbone et à bords durs des épées chinoises les rend excellentes pour couper et maintenir un bord, mais fragiles lors des rencontres bord sur bord.

Au-delà des raisons métallurgiques, le travail au sabre chinois dévie avec le plat pour des raisons de principe. Le principe de base de l’approche chinoise du maniement de l’épée est que chaque réponse au coup du 对方 duì fāng n’est pas une défense dualiste puis contrecarrée par une attaque, mais est un mouvement fluide et sans rupture. Il n’y a ni parade ni riposte ni dans jiànfǎ ni dans dāofǎ. Il y a ce que l’on appelle en mandarin 單形 dān xíng, littéralement une forme unique ou simple. L’acte de dévier consiste à viser et à contre-couper. Il s’agit à proprement parler d’une déviation. Un mot, une action, aucune pensée de défendre puis de chercher une attaque. Il y a une intention mentale avec la déviation et la cible simultanément comme un tout plus grand. L’attaque et la défense n’existent pas dans l’escrime chinoise bien pratiquée. La déviation avec la lame à plat aligne non seulement la contre-coupe, étant un mouvement continu, mais génère également de la puissance pour l’action de coupe du mouvement de déviation-coupe. N’étant qu’un seul mouvement, sans changement brutal de direction, aucun élan n’est perdu. La quantité de mouvement de la déviation fournit ainsi de la puissance à la coupe qu’elle génère. Pour ces raisons, l’escrime chinoise se concentre uniquement sur l’utilisation de la lame à plat pour dévier.

Scott M. Rodell in Deflections in Chinese Swordsmanship

Un acte sans désir

Portrait du professeur Cheng Man Ching

Cheng Man Ching est décrit par ses étudiants comme un exemple de dévouement et d’engagement total envers les arts chinois, et en particulier envers le taijiquan. En effet, tout en défendant également les aspects de santé du taijiquan et son utilisation pour la défense personnelle, Cheng Man Ching a vu la culture de soi dans … Lire la suite

Hommage au taijiquan Zheng zi

Maître Ju Hongbin pratiquant l'épée de Cheng Man Ching

Documentaire réalisé en 2010 par l’International Cheng man Ching Heritage AssociationTai Chi

Ce documentaire rend hommage au taijiquan Zheng zi, une forme en trente-sept postures, créée par maître Zheng Manqing en 1938. Maître 鞠鴻賓 Jū Hóngbīn, disciple direct de Zheng Manqing y est interviewé. Maître Ju Hongbin s’est consacré pendant plus de 50 ans à la promotion du taijiquan Zheng zi.

Sous la surface des choses

Alba lunare, 1930, Gerardo Dottori

« A mes yeux, il me semble avoir été qu’un enfant jouant sur le rivage, réjoui de trouver de temps à autre un galet mieux poli ou un coquillage plus joli qu’à l’ordinaire, tandis que le vaste océan de la Vérité s’étendait devant moi, inconnu. » — Isaac Newton

Le souffle coule dans le champ de cinabre

Libellule au lotus, 1954, Zheng Manqing

氣沉丹田 qì chén dāntián est l’un des aphorisme les plus connu du taijiquan. Comme souvent avec les aphorismes du taijiquan, il importe de comprendre qu’il ne s’agit pas d’une injonction, ni d’une méthode, mais de l’énoncé d’un résultat. La méthode, elle, relève traditionnellement de l’enseignement oral.

La compétence de fa jin

La poussée de Cheng Man Ching

Le chapitre 9 du treizième traité de maître Zheng Manqing sur le taijiquan aborde, 曰能發勁 yuē néng fā jìn, la compétence de fa jin.

Attention versus atténuation

Théorie générale du Taijiquan de Wang Zongyue, page 1

Les pratiquants de taijiquan savent probablement qu’il est important de prêter attention à ce qu’ils pratiquent, mais ils peuvent ne pas se rendre compte qu’il est naturel et normal pour les humains d’atténuer ou de rejeter divers signaux que nous recevons. Comme nous ne sommes capables de traiter qu’une quantité assez limitée d’informations à la fois, nous supprimons nécessairement les informations qui semblent moins importantes.

Taiji engendre Liangyi

Vase, Ando Jubei (1876-1953), 20e siècle, émail cloisonné et argent, musée Liang Yi

乾坤太極生兩儀

道生一,一生二,二生三,三生萬物。

道德經

Le dao a produit un ; un a produit deux  ; deux a produit trois ; trois  a produit tous les êtres.

道生一 dào shēng yī

Le dao a produit un signifie que 無極 wújí a engendré 太極 tàijí.

一生二 yī shēng èr

Un a produit deux signifie que 太極 tàijí a engendré 兩儀 liǎngyí.

无极生太极, 太极生四象,四象生八卦.

Wújí engendre tàijí, tàijí engendre liǎngyí , liǎngyí engendre  sìxiàng, sìxiàng engendre bāguà.

Laozi dit : Les dix mille choses sous le ciel naissent de l’existence, l’existence nait de la non-existence. Cette non-existence est sans forme, sans apparence, sans couleur et sans son, sans odeur et sans goût, ni chaude ni froide, sans gauche ni droite, sans avant ni arrière, sans intérieur ni extérieur, sans début ni fin, sans bords ni limites, sans sentiments et sans pensées, sans bonté et sans mal, vague et confuse, indistincte et profonde, sans signes de sa présence, insondable, l’extrême du vide et du néant, par conséquent on l’appelle non-existence, 無 wú.

Wújí, c’est la non-existence, 無 wú ; tàijí, c’est l’existence, 有 yǒu. Laozi dit: L’existence naît dans la non-existence, le yǒu et le wú s’engendrent mutuellement.

Les deux extrêmes, 兩儀 liǎngyí, proviennent du phénomène de séparation du 陰 yīn et du 陽 yáng.

L’ours constant

Cheng Man Ching, photographie de Ken Van Sickle

Lorsque le professeur Cheng Man Ching était à Taiwan, quelqu’un lui demanda des instructions sur la pratique de l’ours constant. Cet article est une traduction de l’entretien.<

Pourquoi pratiquer le taijiquan en ces temps de confinement ?

La main du professeur Cheng Man Ching

La pratique régulière du taijiquan peut augmenter la flexibilité et la force et réduire les facteurs de risques cardiovasculaires telles que l’hyperlipidémie ou l’hypertension. L’accent mis sur une posture correcte signifie que le taijiquan peut insuffler une plus grande conscience du corps et de la façon dont il se déplace dans l’espace. Le taijiquan
être pratiqué n’importe où, notamment à la maison en ces temps de confinement.

Les cadres du taijiquan

Forge d'une lame pour tailler les sabots des vaches dans l’atelier de Taniguchi Toshiatsu à Shōbara, préfecture d’Hiroshima

Chaque posture du taijiquan traditionnel, qu’elle soit basse, moyenne ou haute, a sa propre force et son but.