Traduction libre de l’article Essay: Dao as the Basis for Morality de Yuka Kamamoto paru dans The Nanyang Philosophy Review.
Introduction
Dans la philosophie morale chinoise, le taoïsme (道教 dào jiào) est souvent mal compris comme nihilisme moral ou anti-moralisme en ce qui concerne le passage suivant du chapitre 18 du Livre de la voie et de la vertu (道德經 dào dé jīng) :
大道廢,有仁義;
道德經 18
智慧出,有大偽;
六親不和,有孝慈;
國家昏亂,有忠臣。
Mais la Grande Voie périclita
Alors régnèrent Bienveillance et Justice
Intelligence et Savoir-faire apparurent
Ce fut la Grande Hypocrisie
Les Six relations se désaccordèrent
On ne vit plus que piété filiale et amour paternel
Les pays connurent l’anarchie
Ce fut le temps des ministres fidèles
Traduction Claude Larre
À partir de là, Laozi semble exprimer son scepticisme à l’égard des visions conventionnelles de la connaissance, de la sagesse, de la culture et du statut.
上德不德,是以有德;下德不失德,是以無德。上德無為而無以為;下德為之而有以為。上仁為之而無以為;上義為之而有以為。上禮為之而莫之應,則攘臂而扔之。故失道而後德,失德而後仁,失仁而後義,失義而後禮。夫禮者,忠信之薄,而亂之首。前識者,道之華,而愚之始。是以大丈夫處其厚,不居其薄;處其實,不居其華。故去彼取此。
道德經 38
Il exprime en outre cette ligne de pensée au chapitre 38 où la perte du 道 dào le plus élevé est censée se détériorer en 仁 rén, 義 yì et 禮 lǐ. Lǐ étant la morale la plus basse, car elle indique l’usure de la loyauté et de la confiance et le début du chaos. En d’autres termes, la doctrine morale confucéenne du rituel (禮 lǐ) est considérée comme un déclin moral dû à un manque de confiance et d’amitié entre les ministres, signalant le début du désordre social et des troubles.
絕聖棄智,民利百倍;絕仁棄義,民復孝慈;絕巧棄利,盜賊無有。此三者以為文不足。故令有所屬:見素抱樸,少私寡欲。
道德經 19
En conséquence, Laozi fait la proposition suivante au chapitre 19 : Coupez le sacré (聖 shèng), abandonnez la sagesse (智 zhì), et le peuple en bénéficiera au centuple. Coupez la bienveillance (仁 rén), abandonnez la droiture (義 yì), et les gens redeviendront filiaux (孝 xiào) et bons (慈 cí). Abandonnez l’adresse (巧 qiǎo), abandonnez le profit (利 lì), et il n’y aura plus de voleurs. Montrez vous simple (素 sù), embrassez la simplicité (樸 pǔ). Soyez moins égoïste (私 sī), modérez vos désirs. (寡欲 guǎ yù).
Ce passage a souvent été interprété comme antimoral, car Laozi semble abriter une hostilité radicale envers les sages enseignements, les principes moraux et la raison intelligente. Au lieu de cela, il semble prôner un retour à un âge d’or antérieur dans l’histoire humaine, où les désirs naturels des gens étaient simples et modestes. Il considère que les règles éthiques existantes ont entraîné des charges excessives d’obligations sociales et familiales, qui ont empêché les gens de vivre dans un état de vie primitif tel que le destinait le dao (Zhang, Qianfan). Le taoïsme a été critiqué pour ne pas avoir établi de cadre moral efficace parce qu’il rejette les obligations et responsabilités morales mêmes celles qui sont essentielles à toute théorie morale ( Eric Baldwin).
Alors que nous pouvons dire que Laozi rejette 仁 rén et 義 yì en tant que doctrines morales confucéennes, il n’est pas correct de dire qu’il est amoral car il ne s’ensuit pas non plus qu’il n’aime pas les vrais 仁 rén et 義 yì. Au contraire, je voudrais affirmer que le taoïsme fournit un cadre éthique holistique qui approuve une orientation morale intuitive et dérivée spontanément de soi, plutôt que de codes de conduite ou de principes moraux préétablis (par exemple, le 仁 rén confucéen ou l’amour universel mohiste (兼愛 jiān ài) . Parce que le cadre éthique taoïste est ontologiquement lié au concept de soi en tant que dérivation et partie du grand dao, je vais d’abord introduire le concept de 德 dé en tant que 道 dào individualisé. Ensuite, j’aborderai les concepts de naturel (自然 zì rán) et de laisser les choses suivre leur cour (無爲 wú wéi) pour démontrer comment la sensibilité aux distinctions sociales et la réponse spontanée sont un véritable exercice de comportement éthique par rapport à une conformité automatisée aux normes éthiques conventionnelles.
De comme Dao individualisé
道可道,非常道。名可名,非常名。無名天地之始;有名萬物之母。故常無欲,以觀其妙;常有欲,以觀其徼。此兩者,同出而異名,同謂之玄。玄之又玄,衆妙之門。
道德經 1
Ce qui rend l’éthique taoïste unique, c’est qu’elle est étroitement liée à ses concepts ontologiques de 道 dào et 德 dé. Je commencerai par introduire la nature ineffable et impermanente du dao. Dans le chapitre d’ouverture du Livre de la voie et de la vertu (道德經 dào dé jīng), le dao est considéré de deux manières différentes : sans nom (無名 wú míng) et nommé (名 míng). Tout d’abord, le dao sans nom est considéré comme le commencement du ciel et de la terre (天地之始 tiān dì zhī shǐ).
人法地,
道德經 25
地法天,
天法道,
道法自然。
Au chapitre 25, les êtres humains sont mis en relation avec le daosans nom :
Les hommes suivent la terre,
la terre suit le ciel,
le ciel suit le dao
et le dao suit la nature.
Si le daosans nom est la source des principes métaphysiques de la terre et du ciel, alors les êtres humains appartiennent également à ce schéma métaphysique. Pour que les êtres humains se rapportent au daosans nom, nous devons constamment éliminer les désirs (無欲 wúyù) permet d’observer ses mystères (妙 miào). Deuxièmement, le daonommé est appelé la mère des myriades de créatures (萬物之母 wàn wù zhī mǔ), la source du changement et de la multiplicité dans le monde. Et pour que nous puissions nous rapporter au daonommé, nous devons constamment avoir des désirs (常有欲 cháng yǒu yù) afin d’observer ses manifestations (以觀其徼 yǐ guān qí jiǎo). Ainsi, la différence entre les deux points de vue est que le premier dao apparaît dans l’unité parce qu’il reste sans nom en tant qu’énigme, tandis que le second dao diverge en distinctions parce que nous le nommons en fonction de ses manifestations.
Maintenant que nous comprenons 道 dào comme un concept ontologique, quelle est exactement sa relation avec 德 dé ? Dans le confucianisme, 德 dé est compris comme vertu ou bonté morale. D’autre part, dans le taoïsme, 德 dé ne signifie pas bonté morale, mais le plus haut 德 dé est considéré comme être bon. Chan propose la définition de dé comme dào individualisé :
德 dé est le 道 dào individualisé. Alors que le dào est commun à tous, c’est ce que chaque chose a obtenu du dào, son dé, qui la rend différente des autres. Dé est alors le facteur d’individualisation, l’incarnation de principes définis qui donnent aux choses leurs traits ou caractères déterminés.
Qianfan Zhang
En d’autres termes, dé est la spécificité d’un individu dans le contexte plus large du dào. Il est également important de noter que non seulement les êtres humains possèdent dé ; toute créature ou chose qui peut être considérée comme un individu possède également dé. On peut évaluer l’efficacité du dé de chaque individu selon comment il se réalise tel qu’il est par rapport aux autres, dans son environnement
. Plus précisément, en termes de moralité, dé a l’efficacité la plus faible lorsque nous formons des distinctions nettes entre soi et les autres (individuation du daonommé) ; et a la plus grande efficacité lorsque nous imitons le naturel (自然 zì rán) et laissons les choses suivre leur cours (無為 wú wéi) (individuation du daosans nom).
Ziran et wuwei
En se référant au chapitre 25, daosans nom est communément interprété comme un concept métaphysique qui se modèle sur 自然 zì rán, ou ce qui est naturel (Ivanhoe et Van Norden). Cette interprétation naturaliste du ziran est problématique car elle propose la prescription éthique de suivre le courant (Wang), ce qui semble contradictoire avec ce que préconise le Livre de la voie et de la vertu (道德經 dào dé jīng) sur le rejet des normes éthiques. Arthur Waley propose une traduction plus appropriée de ziran, qui signifierait spontanéité ou soi-même. Il combine littéralement les deux caractères 自 zì (signifiant soi) et 然 rán (signifiant ainsi), pour décrire le soi inconditionné et spontané.
道生之,德畜之,物形之,勢成之。是以萬物莫不尊道而貴德。道之尊,德之貴,夫莫之命常自然。故道生之,德畜之;長之育之;亭之毒之;養之覆之。生而不有,為而不恃,長而不宰,是謂玄德。
道德經 51
Cette interprétation de ziran renvoie au chapitre 51 du Daodejing, où dé est censé être honoré (尊 zūn) par la myriade de créatures (萬物 wàn wù) non pas parce que cela est décrété, mais parce que c’est naturel (Ivanhoe et Van Norden). En tant que tel, le dé est également calqué sur le soi, et honorer notre dé individuel, c’est encourager la spontanéité en soi plutôt que d’imposer des distinctions entre ce qui est naturel et ce qui ne l’est pas. En d’autres termes, posséder le dé le plus élevé, c’est pratiquer le 無為 wú wéi, tandis que posséder le dé le plus bas, c’est agir (為 wéi) (Ivanhoe et Van Norden).
Le taoïsme est souvent mal compris comme décourageant la délibération morale ou la prise de décision rationnelle. En effet, 無為 wú wéi est souvent traduit par non-agir et interprété à tort comme signifiant passivité ou accepter les choses telles qu’elles sont et… [éviter] d’imposer sa volonté au monde (Eric Baldwin). L’interprétation plus proactive signifierait agir contre les normes et pratiques existantes (Karyn Lai). Pour obtenir une signification éthique plus profonde de wú wéi, il est utile de comprendre son terme opposé, 有為 yǒu wéi. Chad Hansen propose deux sens de 爲 wéi, le premier moyen d’agir pour tenter d’atteindre des objectifs socialement définis. Le second signifie estimer, ou juger ou évaluer, qui relève des modèles de réponse socialement induits, appris, à l’opposé d’une réponse autonome ou spontanée (Chad Hansen). Par conséquent, wú wéi signifie agir d’une manière qui n’est pas conditionnée ou limitée aux normes et valeurs conventionnelles. Afin de comprendre l’importance d’exercer wú wéi, il est utile de reconnaître le mécanisme social du langage comme Hansen l’explique succinctement ici :
Apprendre les distinctions sociales implique généralement d’intérioriser les préférences de la société. En distinguant avoir et manquer, on apprend à préférer avoir. En distinguant le beau du laid, nous apprenons à préférer le beau. Apprendre des noms façonne nos attitudes comportementales, nos désirs. C’est parce que nous apprenons les noms en imitant leur utilisation pour guider les choix dans des contextes ordinaires. Nous ne les apprenons pas en classe par récitation. Ainsi, nous apprenons à laisser les noms nous guider pour faire les mêmes choix que nos modèles sociaux (enseignants). Notre apprentissage consiste à accroître chaque jour notre maîtrise du système des noms … Le langage est un outil dans le projet de société de façonner nos motivations comportementales.
Chad Hansen in A Daoist Theory of Chinese Thought: A Philosophical Interpretation
聖人無常心,以百姓心為心。善者,吾善之;不善者,吾亦善之;德善。信者,吾信之;不信者,吾亦信之;德信。聖人在天下,歙歙為天下渾其心,百姓皆注其耳目,聖人皆孩之。
道德經 49
Il est également important de considérer l’aspect psychologique du wú wéi pour défaire les distinctions sociales et les préférences qui sont ancrées dans notre langage quotidien. Dans le chapitre 49 du Daodejing, il est dit que « les sages (聖人 shèng rén) ont une cœur (心 xīn) impermanent (無常 wú cháng) » parce qu’ils possèdent une vertu constante et « prennent le cœur des gens comme leur cœur ». Ils sont bons pour les « bons » et aussi pour ceux qui ne sont « pas bons ». En d’autres termes, les sages pratiquent wú wéi en étant bons envers les autres sans adhérer au sens conventionnel à ce qui est bon et mauvais. En dissolvant les distinctions éthiques dictées par la société, ils peuvent être dans le monde (在天下 zài tiān xià) et spontanément s’accorder au cœur des gens (以百姓心為心 yǐ bǎi xìng xīn wéi xīn).
L’éthique de la spontanéité
Le Livre de la voie et de la vertu (道德經 dào dé jīng) rejette les normes conventionnelles d’éthique précisément parce qu’elles dictent comment les gens doivent agir. Du point de vue taoïste, l’endoctrinement qui inculque les valeurs confucéennes, mohistes et légalistes limite la capacité de l’individu à répondre spontanément. D’autre part, l’accent taoïste sur la douceur et la non-affirmation de soi aide l’individu à être souple et sensible dans son interaction avec les autres – l’image du nouveau-né, de l’eau, des rivières, des mers, des vallées et de la femme dans le Livre de la voie et de la vertu met en exergue les qualités de douceur (柔 róu), de fragilité (弱 ruò), de quiétude (靜 jìng) et de non-affirmation (不爭 bù zhēng) (Karyn Lai). C’est le cadre ontologique unique du 道 dào et du 德 dé qui permet à l’individu de reconnaître l’unité profonde de toutes les créatures et son inséparabilité des autres entités. Se voir non pas comme des individus autonomes mais comme des moments interdépendants d’un tout plus vaste, qui est le dào, dissout toutes les distinctions sociales qui menacent la réalisation du dé. Dans le chapitre 20 du Livre de la voie et de la vertu, Laozi rejette les enseignements d’autres écoles de pensée principalement parce qu’elles enseignent des distinctions éthiques normatives :
絕學無憂,唯之與阿,相去幾何?善之與惡,相去若何?人之所畏,不可不畏。荒兮其未央哉!衆人熙熙,如享太牢,如春登臺。我獨怕兮其未兆;如嬰兒之未孩;儽儽兮若無所歸。衆人皆有餘,而我獨若遺。我愚人之心也哉!沌沌兮,俗人昭昭,我獨若昏。俗人察察,我獨悶悶。澹兮其若
道德經 20
海,飂兮若無止,衆人皆有以,而我獨頑似鄙。我獨異於人,而貴食母。
Renoncez à l’étude, et vous serez exempt de chagrins.
Combien est petite la différence de weï (un oui bref) et de o (un oui lent) !
Combien est grande la différence du bien et du mal !
Ce que les hommes craignent, on ne peut s’empêcher de le craindre.
Ils s’abandonnent au désordre et ne s’arrêtent jamais.
Les hommes de la multitude sont exaltés de joie comme celui qui se repaît de mets succulents , comme celui qui est monté, au printemps, sur une tour élevée.
Moi seul je suis calme : (mes affections) n’ont pas encore germé.
Je ressemble à un nouveau-né qui n’a pas encore souri à sa mère.
Je suis détaché de tout ; on dirait que je ne sais où aller.
Les hommes de la multitude ont du superflu ; moi seul je suis comme un homme qui a perdu tout.
Je suis un homme d’un esprit borné, je suis dépourvu de connaissances.
Les hommes du monde sont remplis de lumières ; moi seul je suis comme plongé dans les ténèbres.
Les hommes du monde sont doués de pénétration ; moi seul j’ai l’esprit trouble et confus. Je suis vague comme la mer ; je flotte comme si je ne savais où m’arrêter.
Les hommes de la multitude ont tous de la capacité ; moi seul je suis stupide ; je ressemble à un homme rustique.
Moi seul je diffère des autres hommes, parce que je révère la mère qui nourrit (tous les êtres).
Les doctrines éthiques qui exigent seulement que les gens suivent des normes dictées n’inspirent pas la spontanéité. Cependant, cela ne veut pas dire que l’éthique taoïste du laisser les choses suivre leur cours (無為 wú wéi) est incompatible avec de telles normes éthiques. Comme je l’ai mentionné au début de l’article, Laozi pouvait rejeter ces institutions morales, mais il ne s’ensuit pas qu’il n’apprécie pas la vraie bienveillance et la droiture. Ces valeurs morales peuvent être des considérations dans le cadre éthique taoïste, mais elles ne sont qu’une priorité secondaire après la spontanéité et le wú wéi. Les règles morales fixes et formulées ne peuvent pas être considérées comme l’autorité morale finale et absolue, car ce n’est que par la reconnaissance de la spécificité, de l’interdépendance et de la spontanéité (自然 zì rán) du distinct que peut être inspiré l’esprit d’ouverture envers les autres. La pratique du wú wéi est le seul moyen pragmatique pour les individus de répondre avec souplesse à toute situation immédiate où les besoins d’un autre interdépendant sont également en jeu. Dans le chapitre 15 du Livre de la voie et de la vertu, le processus par lequel le moi individuel fusionne avec l’autre interdépendant, et où les distinctions sont inversées, est décrit :
古之善為士者,微妙玄通,深不可識。夫唯不可識,故強為之容。豫兮若冬涉川;猶兮若畏四鄰;儼兮其若容;渙兮若冰之將釋;敦兮其若樸;曠兮其若谷;混兮其若濁;孰能濁以靜之徐清?孰能安以久動之徐生?保此道者,不欲盈。夫唯不盈,故能蔽不新成。
道德經 15
Dans l’antiquité, ceux qui excellaient à pratiquer le Tao étaient déliés et subtils, abstraits et pénétrants.
Ils étaient tellement profonds qu’on ne pouvait les connaître.
Comme on ne pouvait les connaître, je m’efforcerai de donner une idée (de ce qu’ils étaient). Ils étaient timides comme celui qui traverse un torrent en hiver.
Ils étaient irrésolus comme celui qui craint d’être aperçu de ses voisins.
Ils étaient graves comme un étranger (en présence de l’hôte).
Ils s’effaçaient comme la glace qui se fond.
Ils étaient rudes comme le bois non-travaillé.
Ils étaient vides comme une vallée.
Ils étaient troubles comme une eau limoneuse.
Qui est-ce qui sait apaiser peu à peu le trouble (de son cœur) en le laissant reposer ?
Qui est-ce qui sait naître peu à peu (à la vie spirituelle) par un calme prolongé ?
Celui qui conserve ce Tao ne désire pas d’être plein .
Il n’est pas plein (de lui-même), c’est pourquoi il garde ses défauts (apparents), et ne désire pas (d’être jugé) parfait.
Au début, nous devons être « prudents » en portant une attention particulière à l’environnement où le soi se rapporte à l’autre. Au lieu de suivre facilement les normes et les attentes sociales, nous devons être attentifs à la présence de distinctions qui se manifestent par le daonommé. En laissant derrière nous ces préférences et ces désirs qui nous sont enseignés par la société et qui nous sont si familiers, c’est aussi effrayant que la glace sur le point de se briser que nous marchons sur le chemin de ce qui est 自然 zì rán. Si nous pouvons surmonter cette peur face à l’énigme du daosans nom, nous devenons réservés et sommes des visiteurs à la porte des mystères. Et tandis que nous commençons à nous unifier avec l’Unité Enigmatique, nous devenons indifférenciés comme de l’eau boueuse. Le point d’inversion, c’est quand nous clarifions l’eau boueuse. Nous pouvons à nouveau voir les distinctions pour ce qu’elles sont et être sensibles à leurs implications morales à travers la pratique du wú wéi. Il n’est pas nécessaire d’être nourri de normes morales pour guider notre comportement éthique, et nous pouvons mener une activité éthique avec le minimum, qui est la spontanéité.
Conclusion
En prenant 自然 zì rán comme règle pour réaliser le 德 dé de l’individu vis-à-vis de l’autre interdépendant, nous pouvons appliquer wú wéi comme pratique éthique pour défaire les normes sociales et les distinctions éthiques. Le taoïsme a un cadre éthique, où la spontanéité est considérée comme la priorité absolue du raisonnement moral, et l’individu possède la capacité la plus flexible de répondre à toute situation morale.
- 道德經
- Le Livre de la voie et de la vertu traduction par Stanislas Julien.
- Essay: Dao as the Basis for Morality by Yuka Kamamoto
- On Buddhist and Taoist Morality – Eric Baldwin
- Human Dignity in Classical Chinese Philosophy: The Daoist Perspective – Qianfan Zhang
- Ziran and Wuwei in the Daodejing: An Ethical Assessment – Karyn Lai