Le Tyger, d’Emily Loizeau, un conte du départ, enregistré dans une ancienne magnanerie entre Ardèche et Cévennes, explore le symbolisme du tigre de la montagne. Les mélodies d’Emily chantent aussi l’Autre bout du monde, les Eaux sombres, la Complainte du partisan et le Chagrin des oiseaux avec le même grain de délicatesse dans la voix. La définition même de l’élégance, qui se nourrit d’images, de sons et de mots. De danse, aussi. Cette poésie du corps qui enchaîne les mouvements comme on brode, peint, ou rit.
抱虎歸山
En taijiquan, il existe plusieurs séquences de mouvements relatives au tigre :
- Enlacer le tigre et retourner dans la montagne
- Frapper le tigre à gauche
- Frapper le tigre à droite
- Reculer et chevaucher le tigre
- Bander l’arc et tirer sur le tigre
Enlacer (抱 bào) le tigre (虎 hǔ) et retourner (歸 guī) dans la montagne (山 shān) interprété par le GM Cheng Man Ching.
Enlacer le tigre et retourner dans la montagne est la dix septième posture de la forme en trente sept pas du professeur Cheng Man Ching.
Enlacer la taille de l’adversaire, cette seule parade pourrait alimenter un dictionnaire de poésie politique.
Le tigre qui renverse la montagne est également le troisième mouvement du qi gong de conduite de l’énergie du Wudang nei dan gong.
Le tigre est un résistant en quête de légitimité. En Inde et à Ceylan, le Tigre de la rébellion s’oppose au Lion gouvernemental. Dans la pratique du kung-fu, le Tigre représente à la fois le printemps, la force et la bravoure chevaleresque. C’est une figure paradoxale, entre protection et attaque, et la dualité de cette symbolique se retrouve dans le taijiquan avec l’absorption (protection) et la restitution (attaque) de l’énergie adverse, pour pouvoir vaincre sans force. On peut alors chevaucher le Tigre et gravir la montagne, l’image d’un pouvoir apaisé des passions.
Les passions une fois oubliées, le Tigre se terre dans la montagne.
Le Qi Gong de Zhou Lüjing
Le Tigre représente l’essence originelle présente dans le corps, le souffle vital contrarié par les passions de l’existence. Il évoque l’imperfection de l’être humain, tandis que la montagne est, elle, le lieu de la philosophie et de la réflexion.
Tigre peut se traduire par 虎 hǔ ou 虍 hǔ, dont la prononciation est proche de 福 fú qui signifie bonheur, bénédiction ou de 佛 fó, bouddha. Peut-être que ce que le Tigre va chercher dans la montagne est-ce une bénédiction ?
虎跑梦泉
La source (泉 quán) du rêve (梦 mèng) du tigre (虎 hǔ) qui gratte le sol (跑 páo), est lovée dans la vallée au sud du Lac de l’Ouest de Hangzhou. La source du tigre de Hangzhou contient l’eau utilisée pour la culture du très réputé thé vert du Puits du Dragon de la colline de l’Empereur de Jade (wáng shān lóng jǐng). Cachée dans un vallon au sud-ouest du Lac de l’Ouest de Hangzhou, cette source aurait été découverte par deux tigres, d’où son nom.
En effet, d’après la légende, un grand maître bouddhiste du IXe siècle en voyage à Hangzhou n’aurait pas réussi à trouver à se rafraichir. En rêve, Dieu lui serait apparu pour lui dire de suivre les deux tigres qui se présenteront à lui. Le lendemain, le moine se promenant dans la forêt aperçu deux tigres qu’il suivit. Les tigres se mirent alors à creuser la terre d’où une source jaillit, la source du tigre de Hangzhou.